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Le Courrier L'essentiel, autrement

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Ce monde est le nôtre

KEYSTONE
Bilan

L’année qui s’achève a été compliquée, pour user d’un euphémisme. Bien des certitudes ont volé en éclats. L’annihilation de la bande de Gaza s’est poursuivie, sans que le droit international et le droit de vivre dans la dignité des Palestinien·nes ne connaissent ne serait-ce qu’un début de respect, ceci alors qu’un génocide se déployait sous nos yeux. L’impérialisme étasunien s’est manifesté avec une brutalité et un cynisme renouvelé.

Dans les pays riches, désemparés par les taxes infligées par un Donald Trump qui a acté la fin du cycle néolibéral pour se replier sur un mercantilisme très Ancien Régime, on est prêt à toutes les bassesses pour s’attirer les bonnes grâces de la Maison blanche. Le président étasunien a pourtant affiché des tendances dictatoriales des plus inquiétantes. L’Amérique latine et ses voisins immédiats ont aussi de quoi s’inquiéter: le Venezuela et ses réserves pétrolières sont dans le collimateur étasunien; le Groenland va-t-il être annexé?

L’intelligence artificielle est par ailleurs en train de bouleverser les rapports de production et risque de modifier notre relation au monde, tandis que son impact notamment sur l’emploi pourrait s’avérer dévastateur.

La recomposition en cours est déstabilisante, mais elle n’est pas nouvelle. Tout ce qui avait solidité et permanence part en fumée, écrivait déjà l’auteur du Manifeste du Parti communiste il y a près de 180 ans. Nous vivons cependant une période d’accélération de l’histoire, qui ébranle nos certitudes et nous oblige à nous réinventer. C’est le moment de consolider certaines valeurs: la prééminence de l’être sur l’avoir, la solidarité, le souci du long terme, le refus du cynisme et du chacun pour soi au profit du collectif.

Pour démoralisant que 2025 ait pu être, l’année écoulée a aussi été l’occasion de réaffirmer des priorités qui sont aussi celles défendues par votre journal. La flottille pour Gaza a été l’un de ces moments, tout comme les manifestations de solidarité qui ont suivi l’arraisonnement des bateaux, le caractère décidé et massif de ce soutien populaire tranchant avec l’attentisme et le cynisme de nos édiles. La répression qui s’est abattue sur ce mouvement social, et notamment sur les mobilisations étudiantes, montre que cela inquiète les forces politiques et économiques dominantes. La logique systémique est davantage déstabilisée par ce refus des folies guerrières que les puissants ne veulent bien l’admettre.

Les temps sont difficiles. Mais c’est aussi dans la lutte et l’engagement que les fatalités s’inversent. Dans Les Ailes du désir , le très beau film de Wim Wenders, un ange revenu à la condition humaine lance à son alter ego qui l’a précédé dans l’aventure: «Attends, ne t’en va pas, je veux que tu me dises, je veux tout savoir, tout!» Et l’autre lui répond: «Tu dois tout apprendre par toi-même, c’est ça qui est beau.»

Tout est ouvert, ce monde est le nôtre, ne laissons pas les négativités nous freiner.

Bonne année à toutes et à tous!