Je tiens à exprimer ma consternation face au récent reportage de Léman Bleu intitulé Aide sociale (24 novembre 2025). En relayant des chiffres totalement décontextualisés, la chaîne contribue à stigmatiser les personnes précaires et s’aligne sur un discours sensationnaliste porté par une partie de la droite et de l’extrême droite.
Les montants présentés comme scandaleux reflètent le coût de la vie à Genève. Par exemple, les frais dentaires (570 francs en moyenne) correspondent à un suivi de base. De même, les frais de lunettes sont eux aussi ordinaires, les montures étant plafonnées à 150 francs et les verres progressifs non remboursés par la LAMal malgré leur caractère indispensable. Autre exemple: les frais d’installation n’ont rien de luxueux: ils sont limités à 1000 francs, ce qui oblige les bénéficiaires à se meubler d’occasion. Concernant les 159,3 millions de loyers et nuits d’hôtel, le reportage fait preuve d’un manque flagrant de rigueur: cela revient à environ 416 francs par mois et par personne pour les 40 000 bénéficiaires. De plus, l’argent va directement aux propriétaires privés, régies et hôteliers, ces derniers qui par ailleurs profitent largement de la crise du logement.
Avec une véritable politique publique du logement, l’Etat n’aurait pas à financer des séjours en hôtel pour un montant de 9,3 millions. Ce vent réactionnaire vise à dévaloriser les minima sociaux et à désigner les plus vulnérables comme boucs émissaires pour préparer les attaques contre la population et les prestations. C’est du côté des plus aisé·es et des grandes fortunes, non sur le dos des plus pauvres, qu’il faut demander des comptes! Léman Bleu aurait pu produire un travail journalistique sérieux et contextualiser les chiffres plutôt que les asséner sans analyse. C’est très bas.
Vincent Bircher,
travailleur social, président du SSP-Genève