L’idée d’un nouveau parc à l’avenue d’Aïre peut sembler à première vue légitime. N’est-ce pas le devoir de tout pouvoir public d’offrir des espaces verts à ses citoyens? Toutefois, l’acquisition de la villa de Zep répond-elle à cette attente? Cette maison de maître, pour laquelle la Ville de Genève n’a aucun projet, est classée depuis 1959: même les travaux ordinaires d’entretien sont soumis à étude et autorisation. La réalité de son terrain, de taille modeste, constitué de forêt, de vignes et inscrit au patrimoine fédéral des biens à protéger ne permettra peut-être pas de réaliser un parc. Le MCG, à l’origine de la proposition, avançait comme argument qu’il fallait empêcher qu’un propriétaire privé «voire étranger» ne s’en empare. On parlait même d’un acheteur saoudien prêt à signer avant fin 2024.
C’est au nom de cet argument qu’un vote dans l’urgence a été imposé au Conseil municipal, en débat accéléré, sans le moindre rapport écrit et sans étude sérieuse.
Nous estimions alors que cet achat méritait un peu de lumière: plus de 3000 Genevois ont demandé que le peuple soit consulté. Depuis, l’urgence a disparu et l’acheteur fantôme aussi.
Aujourd’hui Genève traverse une période économique très inquiétante: des milliers d’emplois disparaissent dans la Genève internationale avec un effet domino sur la Genève locale. Dans un tel contexte, la priorité devrait être d’assurer les prestations sociales pour lesquelles la Ville s’est déjà engagée.
Depuis des années, trouver une place en crèche relève du parcours du combattant. Le dialogue et la collaboration entre l’Etat et la société civile serait une solution. Notre Conseil administratif a décidé que ce n’en était pas une, mais qu’il fallait plutôt municipaliser les crèches. Résultat: plus de 1000 enfants n’ont toujours pas aujourd’hui de place.
La Ville possède également plus de 300 immeubles à caractère social. Certains sont délabrés. La situation est préoccupante: radiateurs qui ne marchent pas, peinture qui tombe en morceaux, vitrages simples laissant passer le froid et le bruit. A la Cité Jonction, des familles dorment chaque nuit dans le salon parce que l’humidité et les moisissures rendent les chambres inhabitables. Elles attendent des rénovations depuis plus de vingt ans.
A l’heure où le maire de Genève a présenté un budget déficitaire de 69 millions, gel des salaires dans le secteur public inclus, consacrer l’argent public à garantir la réussite de l’opération immobilière d’un millionnaire relève d’une profonde injustice. Nous sommes face à une gauche qui semble avoir oublié ses valeurs historiques, une gauche qui donne l’impression de privilégier certains amis en laissant les gens de côté.
Il est temps d’envoyer un signal clair: ce n’est pas le moment d’acquérir une villa de luxe, mais de donner la priorité aux Genevois.
Le 30 novembre, dire non à cet achat, c’est dire oui à une ville plus responsable, plus juste et solidaire.
Ramón Jiménez Pomareta,
président PLR, Ville de Genève