Les officines patronales et la droite ne lésinent pas sur les moyens. Elles ont mis 3,7 millions de francs sur la table afin de faire capoter l’initiative pour l’avenir, soumise en votation le 30 novembre. Les milieux bourgeois disposent ainsi d’un budget de campagne près de dix fois supérieur à celui des partisan·es du texte.
Visant à conjuguer lutte pour le climat et justice sociale, l’initiative de la Jeunesse socialiste (JS) veut taxer à hauteur de 50 % les parts des successions et des donations supérieures à 50 millions de francs. La mesure, qui pèserait avant tout sur 270 contribuables, détenant chacun·e une fortune supérieure à 195 millions de francs1>Marius Brülhart: Analyse à l’intention de l’Administration fédérale des contributions. Octobre 2024., tombe sous le sens. Pour deux raisons.
D’abord, parce que «la crise climatique est avant tout une crise des inégalités: les plus riches financent la destruction du climat et en tirent profit pendant que la majorité mondiale en subit les conséquences», comme le rappelle Amitabh Behar, directeur général d’Oxfam. A l’échelle mondiale, les investissements de 308 milliardaires émettent ainsi plus d’émissions de CO2 que 118 pays réunis2>Oxfam, 28 octobre 2025..
Ensuite, parce que le montant des héritages transmis en Suisse atteint des sommets: 100 milliards de francs cette année, un record historique. Motif de cette évolution? «En Suisse, la valeur du capital augmente plus que celle du travail», explique Marius Brülhart, professeur d’économie à l’université de Lausanne3>Handelszeitung, 18 septembre 2025.. Traduction: l’explosion des héritages est le symptôme du creusement des inégalités, qui permet à une minorité de concentrer une part croissante des richesses. Tout en payant toujours moins d’impôts: au cours des trente-cinq dernières années, la fiscalité sur les successions a été divisée par trois, en moyenne, dans les cantons.
Pas étonnant donc que, derrière les officines faisant campagne contre l’initiative pour l’avenir, notamment la mal-nommée Swiss Family Business, on retrouve certaines des grandes fortunes du pays: Magdalena Martullo Blocher, la patronne d’EMS Chemie; l’homme d’affaires Michael Pieper; le banquier Thomas Matter; ou encore Mathias Reinhard, à la tête du gestionnaire de fortune VZ Group.
En proposant de faire passer à la caisse cette classe capitaliste avide pour sauver la planète, la Jeunesse socialiste vise juste. Glissons un «oui» dans l’urne le 30 novembre.
Notes