Skip to content

Le Courrier L'essentiel, autrement

Je m'abonne

Souriez, vous n’êtes pas filmé·es

Le bon sens l’a emporté à Vevey, où 60,6% des votant·es ont refusé dimanche la pose de 44 caméras de surveillance pour luter contre le deal de rue. KEYSTONE
Vevey

Le bon sens l’a emporté à Vevey, où 60,6% des votant·es ont refusé dimanche la pose de 44 caméras de surveillance pour luter contre le deal de rue. Une idée à presque 800’000 francs destinée au périmètre de la gare, dans un paquet comprenant aussi l’amélioration de l’éclairage public, l’engagement de personnel spécialisé et la création d’un observatoire social.

Même si le taux de participation ne le reflète pas (36,4%), le débat a été animé. Voire houleux, entraînant une rupture de collégialité par le syndic, Yvan Luccarini: issu de Décroissance alternative, il a retiré fin avril son soutien au projet approuvé par le Conseil communal et soumis au peuple via un référendum spontané.

La vidéosurveillance a beau se renforcer partout en Suisse, des transports publics aux centres-villes, son efficacité n’est toujours pas démontrée. Même ce qu’on veut mettre dans cette notion d’efficience est débattu: appliquée au cas veveysan, peut-on dire que la mesure aurait été utile si elle avait bloqué le deal à la gare tout en le déplaçant de quelques rues? C’est sans aucun doute ce qui se serait passé. Et que dire du prix à payer pour les nombreux·euses usager·ères traversant quotidiennement la gare, surveillé·es en bloc? Sans oublier les personnes occupant l’ultimissime échelon du trafic de la drogue, le plus souvent des refoulés de l’asile, dont l’exclusion et la stigmatisation seraient encore renforcées.

Au-delà des caméras, d’aucun·es ont vanté les mesures complémentaires envisagées à Vevey, notamment dans les rangs du Parti socialiste, qui a surpris à gauche – formule polie – en soutenant le oui. Des dispositions additionnelles qui n’avaient pas besoin de la vidéosurveillance pour faire sens et qu’il serait sage de repêcher, aussi dans une optique d’évolution du marché de la drogue veveysan, actuellement dominé par la cocaïne.

Car que se passerait-il si le crack glissait ses cristaux dans l’équation? Déjà très problématique à Lausanne, Yverdon ou Genève, cette drogue brise violemment les vies des consommateur·trices, non sans générer de nombreux cas d’agressivité dans l’espace public. Plutôt qu’un alleingang fait de 44 caméras, la nouvelle réponse à Vevey se devra d’être issue d’une concertation plus large, inspirée par l’étonnant pragmatisme qu’on voit régulièrement surgir en Suisse lorsqu’on traite de stupéfiants.

Autour de l'article