Comment se fait-il que des centaines de milliers de Palestinien·nes aient pu être chassé·es de leur maisons il y a septante-sept ans, leurs villages détruits et rebaptisés par les colons sionistes, leur histoire effacée, sans que cette injustice ne soit réparée? Et ce, en dépit d’un droit au retour reconnu par l’ONU… dès 19481> La résolution 194 de l’Assemblée générale des Nations unies, adoptée le 11 décembre 1948, fonde ce droit inaliénable, réaffirmé en 1974.. L’actualité fournit la réponse. C’est un mélange de négation, de reformulation du récit et d’impunité des coupables qui a permis l’occultation de la Nakba. Un nettoyage ethnique qui se poursuit aujourd’hui sous une forme encore plus brutale, celle du génocide.
La Nakba, la «catastrophe» en arabe, est le trauma partagé de plus de 14 millions de Palestinien·es, qu’ils et elles résident en Cisjordanie occupée ou en Israël même – pays dont certain·es devinrent, de fait, des citoyens de second rang dans «l’Etat juif» –, ou à l’étranger en tant que diaspora, ou encore à Gaza.
La bande côtière, en 1948, vit sa population tripler avec l’afflux d’une partie des civil·es expulsé·es par les milices du jeune Etat d’Israël. Gaza, aujourd’hui, est un territoire exsangue. On ose à peine articuler le nombre de ses habitant·es, officiellement d’environ 2,1 millions de personnes, tant l’offensive déclenchée par Israël au lendemain de l’attaque du Hamas, le 7 octobre 2023, dessine un génocide aux proportions effroyables. Aux bombardements s’ajoutent la famine et des privations qui, au décompte connu (plus de 53 000 morts à ce jour), additionneront les corps ensevelis et quantités de décès dus à la sous-nutrition et aux complications.
C’est un désastre, une «honte», comme l’a dit mardi sur TF1 le président français, Emmanuel Macron – pourtant né avant la honte. Il est bien tard pour se découvrir une conscience et afficher son indignation quand on tient les leviers. A commencer par l’accord d’association qui, depuis vingt-cinq ans, fait d’Israël un partenaire privilégié de l’Union européenne.
De quoi la Nakba est-elle le nom? D’un fait colonial qui n’a cessé de progresser, avec l’assentiment et la complicité des puissances occidentales, mais aussi arabes, entre autres. Le nettoyage ethnique fut la résultante d’un projet concerté, d’une planification que les «nouveaux historiens» en Israël, dès les années 1980, ont contribué à établir en accédant aux archives d’Etat. Nous publierons demain un grand entretien avec l’un d’entre eux, Ilan Pappé. Auparavant, nous vous proposons un reportage en Israël sur les vestiges de villages jadis palestiniens. Pour faire œuvre de mémoire en cette Journée de la Nakba.
Notes