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Appel aux barricades

Alice Weidel, célèbre le «résultat historique» de l’AfD à Berlin après les législatives. KEYSTONE
Allemagne

Il est second dans le classement, mais l’on ne parle que de lui ce dimanche soir en marge des résultats des élections législatives allemandes. Le parti d’extrême droite Alternative für Deutschland (AfD, l’Alternative pour l’Allemagne) double son score de 2021 en obtenant plus de 20% des suffrages, devenant la deuxième force politique du pays. Pas de n’importe quel pays. En Allemagne, la percée de l’extrême droite s’est avérée plus tardive que chez nombre de ses voisins européens. La force d’un travail de mémoire qui rendait jusqu’à peu inimaginable l’avènement d’un parti qui s’inscrit dans la filiation du national-socialisme.

Mais les digues ont cédé. Poussé par une solide assise dans les Länder de l’est, l’AfD et son thème récurrent d’un rejet violent de l’immigration sont devenus incontournables. Si omniprésents dans le débat public que l’on a accepté à la table un parti dont les supporters scandent «Alice für Deutschland!» en l’honneur de leur cheffe de file, Alice Weidel. Entre autres références à peine masquées au régime nazi.
Malgré ça, et dans un tour de force schizophrénique, le parti d’extrême droite affiche désormais son soutien à Israël – manière de rediriger la haine sur les migrant·es musulman·es. Et le parti d’assumer ouvertement une politique de «remigration» à la Trump, un discours nourri par de récents attentats. Elle est bien loin la politique d’accueil qui avait, sous l’impulsion de l’ancienne chancelière Angela Merkel, permis d’accueillir près d’un million de réfugié·es syrien·nes en Allemagne en 2015.

Quoiqu’attendu, le résultat historique de l’AfD hier soir reste profondément inquiétant. Aucun parti n’avait réussi une ascension aussi fulgurante dans l’histoire de la République fédérale. Alors que déferle sur le monde une vague de xénophobie décomplexée, les remparts contre le fascisme n’en sont que plus importants. Le leader des partis conservateurs CDU et CSU, Friedrich Merz, quasi assuré d’être le futur chancelier, a promis qu’il ne conclurait aucune alliance avec l’AfD. On peut raisonnablement penser qu’il se tournera vers des alliés plus naturels, SPD en tête, bien que la formation accuse un important recul.

Mais la résistance idéologique ne viendra pas de là. Une autre étincelle s’est enflammée hier. Tout à gauche de l’hémicycle, face à la déferlante de haine de l’AfD, un autre parti peut s’estimer heureux de ses résultats. Die Linke, parti de la gauche de la gauche que l’on donnait pour mort il y quelques semaines, réalise une opération extraordinaire en s’octroyant près de 9% des voix et devenant même le premier parti chez les jeunes. Il appelle à «monter sur les barricades». Il le faudra.