En Allemagne, le cordon sanitaire qui isolait l’extrême droite de la droite dite démocratique a été rompu. Mercredi, la CDU-CSU a accepté le soutien de l’AfD (Alternative für Deutschland) pour faire passer une résolution antimigrant·es. Une violation crasse de la promesse de Friedrich Merz, le possible futur chancelier de l’Allemagne, qu’il n’y aurait aucune alliance avec la droite xénophobe. Ceci à quelques encablures des élections fédérales anticipées du 23 février.
La résolution ne constitue pas un texte contraignant. Mais son impact politique est explosif. Au point de faire sortir jeudi Angela Merkel de sa retraite. L’ex-chancelière de la CDU-CSU a qualifié «d’erreur» le revirement du leader conservateur. De fait, la trahison est de taille. L’AfD sent le soufre. A commencer par son slogan: «Alice für Deutschland», du nom de sa leader Alice Weidel (installée en Suisse!), qui renvoie au «Alles für Deutschland», une des devises de la SA (la Sturmabteilung, l’organisation paramilitaire du parti nazi) et qui tombe d’ailleurs sous le coup de la loi. Cette alliance avec l’extrême droite rompt un tabou. Jamais depuis 1945 un tel rapprochement n’avait été opéré.
La montée des idées fascisantes n’est pas réservée à l’Allemagne. De fait, toute la fachosphère a applaudi à ce vote. A commencer par Viktor Orbán qui a posté sur X «Bonjour l’Allemagne, bienvenue au club». La récente élection de Donald Trump et son cortège de décrets réactionnaires, racistes et sexistes s’inscrivent dans la même dynamique. Son acolyte Elon Musk fait d’ailleurs de l’ingérence dans la campagne allemande en mettant son réseau X à disposition de l’AfD, comme il l’avait fait pour le candidat orange.
En France, le climat sent aussi le roussi. Le premier ministre, François Bayrou, donne des gages à l’extrême droite en utilisant de manière ostentatoire des éléments de langage du Rassemblement national. Sa sortie sur la «submersion migratoire» est une main tendue au parti de Marine Le Pen, dans le but probable d’éviter une censure et la fin de son aventure gouvernementale.
Ces manœuvres politiques se terminent toujours mal. Elles contribuent à asseoir le pouvoir de celles et ceux dont on prétend couper l’herbe sous les pieds. Elles légitiment la clique frontiste. Mais en cela, François Bayrou ne fait que chausser les bottes d’Emmanuel Macron, qui a usé et abusé d’appels du pied au Rassemblement national et à ses avatars, par exemple en parlant du «processus de décivilisation» mis en avant par l’idéologue Renaud Camus. Les esprits étroits se rencontrent.