C’est ce qui nous arrive chaque année et toujours un peu plus tôt. Souvent avant la venue de la première neige. Mais les sapins empoudrés et illuminés chez les fleuristes et dans certains commerces font déjà illusion. Tous les étalages des grandes surfaces suivent en redoublant de zèle en friandises et en mets. C’est le grand retour de la dinde, du chapon, du cardon et du foie gras dans les rayons spécialisés. La légende du Père Noël, elle, a toujours les reins aussi solides. Il est là, omniprésent. Il a même fondé de très sérieuses écoles d’apprentissage.
Plus que jamais cette fête née du commerce est un grand marché avec, accessoirement, des résonances chrétiennes autour de la venue au monde de l’enfant Jésus. Une saga construite pour effacer les saturnales (17 au 24 décembre) des tabelles du paganisme romain. Si dans un passé lointain, cette légende est née de l’ambition des apôtres et de leurs successeurs influenceurs soucieux de bâtir la puissante église catholique romaine, elle est, dans les faits, l’héritière directe de l’Empire romain. Son siège n’est-il pas, dans la ville éternelle, à 7 km de l’amphithéâtre du Colisée, vestige d’Hadrien, héritier du Dieu chrétien sur lequel avait misé Constantin. D’ailleurs l’hypothèse de la date de la naissance divine ne remonte pas à l’an 0 mais seulement au 6e siècle à l’instigation du moine Denis Le Petit. Une distorsion des faits et du temps qui n’a rien à voir avec l’angélisme d’une nativité plurimillénaire, socle d’une église sur laquelle la puissance de la mort n’a pas prise (Matthieu).
Du sacré au laïque, au fil de la vicissitude des siècles, il y en a fallu douze pour que naisse le sapin en Alsace et deux de plus pour qu’apparaisse les garnitures naturelles. La première boule, elle, remonte à 1847 sortie d’une soufflerie de verre dans le Thuringe. La production en série commença 20 ans plus tard pour atteindre l’apothéose qu’on lui connaît depuis la deuxième moitié du 20e siècle. C’est avec l’avènement des grands magasins en 1910 que tout bascula. Dessiné en 1885, le Père Noël, lui, débarqua en chair et en os en 1933 en Amérique sous la houlette avisée d’une certaine boisson gazéifiée célèbre. Il finit par être exporté en Europe après le Seconde guerre mondiale. Une histoire et un parcours riche en enseignement pour nous éclairer sur ce qui était déjà une mondialisation avant l’heure.
Léon Meynet,
Chêne-Bougeries (GE)