Un emplâtre sur une jambe de bois
Adapter un réseau d’autoroutes qui date de 1960, voilà de quoi il s’agit. L’erreur conceptuelle réside dans le fait qu’en 2024 l’idée de faciliter les déplacements massifs en véhicules individuels n’est plus d’actualité entre les grandes villes.
Politiquement, élargir les autoroutes parce qu’il y a des bouchons est assurément la solution de facilité et surtout celle qui nécessite le moins de réflexion et de courage politique. Tout un chacun sait que ce n’est qu’un emplâtre sur une jambe de bois; la seule alternative crédible à long terme, pour un pays aussi riche que la Suisse, consiste à développer massivement les transports publics, trains, bus et navettes en cars. Un car de cinquante places entre Genève et Lausanne, c’est cinquante voitures en moins. Développer des navettes de cars en partenariat avec le secteur privé pour s’adapter aux besoins réels des pendulaires, voilà ce qui serait un moyen adapté à notre temps.
Les positions dogmatiques de celles et ceux qui prônent le «développement» sans en donner la moindre définition nous disent que quand une route est étroite, il faut l’élargir. Le raisonnement est tellement court qu’il faut y rajouter une touche environnementale. Les villages ne seront plus traversés par les voitures qui quittent les autoroutes, les bouchons seront résorbés et la pollution de l’air aura en partie disparu.
Les défenseurs de ces élargissements d’autoroutes pour près de cinq milliards de francs sont les mêmes qui exigent au parlement fédéral des économies du même montant. Une fois encore, face à un vrai problème, ce n’est pas parce qu’une solution est proposée qu’il faut l’accepter. C’est parce qu’elle est mau-vaise qu’il ne faut pas hésiter à la refuser.
Jean-François Bouvier, Genève