Édito

Etats-Unis: un modèle périmé

Etats-Unis: un modèle périmé
KEYSTONE
Elections étasuniennes

Trump II. Le retour du candidat républicain, pour spectaculaire qu’il soit au niveau de la performance, est une mauvaise nouvelle. Pour la démocratie tout d’abord. Voilà un président putschiste – il avait refusé de reconnaître sa défaite il y a quatre ans –, raciste, misogyne et affichant des penchants fascistes. Cela ne semble pas rebuter son électorat.

Le check and balances, cet équilibre institutionnel entre les trois pouvoirs, est menacé d’effondrement. Donald Trump aura une majorité parlementaire. La Cour suprême a été noyautée par des fanatiques à sa botte. Contrairement à 2016 où il avait été élu sans véritable projet, le futur président a derrière lui un parti républicain à ses ordres. Et un agenda. Le très inquiétant Project 2025, concocté par le think tank Heritage Foundation, flirte avec des thèses fascisantes.

C’est une mauvaise nouvelle pour l’environnement, ensuite. La précédente législature de Donald Trump s’était caractérisée par une sortie des accords de Paris, notamment, et par la négation de la crise climatique en général. Le tout sous la coupe des lobbies du pétrole et du gaz de schiste.

Enfin, c’est une mauvaise nouvelle pour la stabilité mondiale. La fascination du prochain président étasunien pour des régimes autoritaires, son mépris du droit international et du multilatéralisme, les guerres commerciales annoncées, notamment contre une Europe affaiblie sur fond de guerre en Ukraine, doivent inquiéter.

L’explication de la déroute de la démocrate Kamala Harris, quant à elle, est sans doute due à des facteurs cumulatifs: campagne très courte en raison du désistement tardif de Joe Biden, poids de l’héritage politique discutable de ce dernier, handicap lié à ses origines afro-asiatiques dans un pays gangrené par le racisme, plafond de verre pour les femmes, refus d’adopter une position un tant soit peu progressiste sur le massacre des Palestinien·nes, ce qui lui aura aliéné une partie de la communauté arabo-musulmane…

Et, plus globalement, c’est toute l’incapacité de sa famille politique à se montrer convaincante sur la question des fins de mois qui a été déterminante. Cela avait aussi lourdement pesé sur l’échec d’Hillary Clinton en 2016: le néolibéralisme ne fait plus recette. Les accords de libre-échange – notamment le fameux Alena conclu avec le Mexique – ont accéléré la désindustrialisation étasunienne.

Le programme de Kamala Harris n’a tout simplement pas réussi à convaincre suffisamment d’électeurs et d’électrices. Mettre en avant la croissance retrouvée, alors que celle-ci sert surtout les intérêts des grandes fortunes dans un rapport dramatiquement dégradé entre revenus du travail et du capital, a été sanctionné, même si l’alternative aura des conséquences désastreuses.

La leçon étant que le camp progressiste, s’il veut s’imposer, doit impérativement proposer des solutions concrètes et crédibles répondant aux besoins essentiels des populations qu’il entend défendre.

Opinions Édito Philippe Bach Elections étasuniennes

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