Édito

France: des airs de Famille Addams

France: des airs de famille Addams
Discours du nouveau ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau. KEYSTONE
France

L’état de grâce n’aura duré que quelques secondes! Le gouvernement français annoncé samedi par le premier ministre, Michel Barnier, ressemble déjà à la Famille Addams. Il faut dire que l’investiture partait d’un mauvais pied: illégitime, car contraire au choix des urnes; imposée au forceps par un Emmanuel Macron de plus en plus autocrate; et portée par le représentant d’un parti (Les Républicains) battu aux élections…

Comme cet attelage de bric et de broc doit compter sur la bienveillance de l’extrême droite, son caractère réactionnaire était annoncé. Mais les associations de défense des droits des femmes et des minorités sexuelles se sont étouffées à mesure que les pedigrees des noms de ministres étaient dévoilés11Elsa de la Roche Saint-André, «IVG, droits LGBT, écoles privées: un gouvernement marqué par les positions très conservatrices de plusieurs ministres», Check News de Libération du 22 septembre.

On retrouve dans la nouvelle équipe gouvernementale une série d’habitué·es de la «Manif pour tous», comme Laurence Garnier (secrétaire d’Etat à la Consommation) et Bruno Retailleau (ministre de l’Intérieur) qui ont défilé contre le mariage pour les personnes de même genre. La première a même annoncé qu’elle refuserait de célébrer de telles unions. On les retrouve sans surprise opposé·es à la sanctuarisation du droit à l’IVG dans la Constitution.

En tout, Libération recense treize ministres ou secrétaires d’Etat sur un collège de 39 (un tiers, donc!) qui se sont illustré·es par des positions réactionnaires sur les questions de droits fondamentaux. Qu’il s’agisse de l’interdiction des monstrueuses thérapies de conversion, de tentatives de proscrire les transitions de genre chez les mineur·es, de leur refus d’ouvrir la procréation médicalement assistée aux couples de femmes ou aux femmes seules, ou en considérant que le climat homophobe et sexiste dénoncé dans l’établissement privé Stanislas – sous contrat avec l’Etat – serait motivé par une haine des écoles sélectes où se cooptent les élites comme la France les affectionne tant. Verrue supplémentaire sur cette trogne des mauvais jours, on peut y ajouter un ministre coronasceptique et adepte des théories disqualifiées du professeur Raoult sur l’hydroxychloroquine en la personne du ministre de la Recherche – excusez du peu –, Patrick Hetzel.

Les plus modéré·es de cette inquiétante camarilla justifient leur refus, par exemple, de la constitutionnalisation de l’avortement par l’affirmation que ce droit ne serait pas menacé en France. On se dit au contraire que face à cette offensive sous haut-patronnage de l’extrême droite, une telle sanctuarisation est une garantie salutaire. On ne pensait simplement pas qu’elle devrait être activée aussi rapidement.

Notes[+]

Opinions Édito Philippe Bach France

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