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Location d’été, ne nous trompons pas de cible

Le logement en question

Pour trouver un hébergement de vacances recourir à Airbnb est de plus en plus fréquent. Le recours à ces plateformes numériques peut aggraver la crise du logement, en retirant des logements pour les affecter à l’hôtellerie. Ce risque ne concerne cependant que les cas où le logement n’est plus utilisé à des fins résidentielles. Rien à voir avec le locataire qui sous-loue le temps de ses vacances. Airbnb1>Airbnb, Airbnb: Reisetrends in der Schweiz a publié des chiffres sur son activité en Suisse (2022): 90% des personnes qui recourent au service ne loue qu’un seul logement; 25 000 «hôtes» obtiendraient ainsi un revenu d’environ CHF 5300.- par an. Le site Insideairbnb complète ces informations. A Genève, 2685 locations sont disponibles sur cette plateforme, dont 1901 logements entiers; 41,8% des hôtes louent plusieurs logements. Ce sont donc vraisemblablement des professionnels. Pour Vaud: 5414 logements disponibles dont 3867 logements entiers; 37,4% des hôtes louent plusieurs logements.

L’administration genevoise estimait (2019) qu’environ 700 logements en Ville de Genève seraient exclusivement affectés l’hôtellerie, dont des immeubles entiers.
Le canton de Genève, à l’initiative de l’ASLOCA, régule le secteur. La location sur une plateforme est licite si elle ne dépasse pas 90 jours par an. Au-delà, le logement peut être considéré comme ayant perdu son affectation résidentielle. Or, la loi cantonale interdit de transformer un logement en local commercial. Ces 90 jours correspondent grosso modo à la durée annuelle des vacances scolaires. Une règle similaire existe dans le canton de Vaud et à Lucerne, à la suite de l’adoption d’une initiative populaire (2023).

Sous-louer est intéressant pour les locataires qui peuvent alléger la part du budget consacré au loyer. Passer par une plateforme facilite la sous-location de courte durée qui n’était guère envisageable auparavant. Il est ainsi possible de trouver rapidement un sous-locataire et de se prémunir contre les risques de non-paiement et de dégâts, avec la quasi-certitude de récupérer l’appartement à la fin des vacances.

Juridiquement, la sous-location est un droit du locataire. Ce dernier ne peut toutefois pas gagner de l’argent. Le sous-loyer doit correspondre à la fraction du loyer principal, selon le nombre de jours de sous-location. Une majoration est possible pour tenir compte des installation louées avec l’appartement (meubles, etc). Le bailleur peut s’y opposer si ces conditions ne sont pas remplies et/ou si la sous-location représente un inconvénient majeur: passages fréquents, caractère social d’un logement, etc. Le locataire qui veut sous-louer sur une plateforme doit se montrer prudent et se renseigner au préalable.

L’utilisation illicite des plateformes numériques est certainement le fait de propriétaires ou de personnes de mèche avec ceux-ci. On imagine mal un simple locataire parvenir à se voir attribuer plusieurs appartements, voir un immeuble entier, et les louer pour de courtes durées autrement qu’au vu ou au su du bailleur ou de la régie. L’opposition des milieux immobiliers au droit de sous-location s’explique donc par la volonté de faciliter la conclusion de nouveaux baux. En effet, les plus fortes majorations de loyer se font au changement de locataire. Or, la sous-location permet au contraire à un locataire de conserver son logement au loyer abordable durant une absence temporaire, par exemple un séjour professionnel à l’étranger.

Les bailleurs ont obtenu du Parlement fédéral la suppression du droit à sous-louer. Ils pourront décider seul d’accorder cette possibilité au locataire. Ils refuseront la sous-location ou résilieront le bail lorsque le loyer est bon marché et, au contraire, autoriseront la sous-location lorsque le loyer leur procure un rendement abusif. L’ASLOCA a lancé un référendum. Cette attaque sur le droit des locataires viendra en votation le 24 novembre.

Durant la campagne, les milieux immobiliers prétendront lutter contre Airbnb. Pour juger de leur sincérité, il s’agira de se rappeler de leurs combats contre les règles de protection du marché locatif à Genève, dans le canton de Vaud et à Lucerne. Il s’agira surtout de se mobiliser pour maintenir le droit de sous-louer, essentiel pour conserver des logements abordables ou réduire le budget des ménages consacré à payer des loyers trop chers.

Notes[+]

Christian Dandrès est conseiller national et juriste à l’ASLOCA. L’auteur de cette chronique s’exprime à titre personnel.

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mercredi 20 octobre 2021

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