Quatre fâcheux milliards
Stupeur et consternation. Les perspectives financières de l’AVS annoncées année après année étaient fausses. L’Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a avoué mardi une erreur de calcul conséquente: le déficit de l’AVS prévu en 2033 a été surévalué de 4 milliards. La formule de calcul serait erronée depuis 2019. Et ce n’est pas sans conséquences. Les projections de l’OFAS sont largement utilisées dans les décisions politiques. Lorsqu’il n’y a pas d’erreur, elles sont déjà réputées pour être très conservatrices et pessimistes.
Lors des votations populaires sur le 1er pilier, la mauvaise santé de l’AVS n’a cessé d’être brandie par la droite. Et la rhétorique a fonctionné en 2022, lorsque le peuple a dit oui de justesse à AVS21. La réforme a entériné la retraite à 65 ans pour les femmes ainsi qu’une hausse de la TVA, sur la base de fausses informations. Comble du cynisme, les erreurs de prévision de l’OFAS dépassent les économies attendues avec AVS21, constatent les Femmes socialistes. Hier, elles ont demandé une nouvelle votation sur l’augmentation de l’âge de la retraite des femmes. Cette demande mérite d’être sérieusement examinée et d’être portée de manière ferme par la gauche dans son ensemble. La demande de l’USS d’octroyer aux femmes «au moins une compensation du renchérissement sur leur supplément de rente» s’avère bien modeste. En moyenne, les femmes reçoivent des rentes 37% inférieures à celles des hommes (en prenant en compte les trois piliers). Et elles subissent régulièrement les attaques du parlement, qui veut leur faire porter les économies du système des retraites. C’est encore le cas avec LPP21 sur laquelle le peuple votera le 22 septembre prochain. Cette réforme du deuxième pilier prévoit de faire passer les petits revenus à la caisse, pour des rentes toujours insuffisantes.
La temporalité de l’annonce faite aujourd’hui est également très malvenue. L’erreur de calcul était connue depuis mai. Et le financement de la treizième rente, acceptée en mars en votation populaire, a depuis lors fait l’objet de moult débats et d’une consultation. Pour des discussions en toute connaissance de cause, pourquoi l’erreur de calcul n’a-t-elle pas été révélée plus tôt? Cette posture attentiste d’Elisabeth Baume Schneider, ministre du Département de l’intérieur, semble difficile à justifier.
Cet épisode démontre enfin que l’alarmisme du Conseil fédéral ne se justifie pas. Pilier solidaire des retraites, l’AVS est trop précieuse pour que des mesures d’économie soient proposées de manière précipitée sur la base de fausses prévisions. Il est temps maintenant d’assurer la dignité des retraité·es en mettant en œuvre au plus vite la treizième rente.