Édito

AVS, un autre financement est possible

AVS, un autre financement est possible
Manifestation lors de la journée d'action nationale de la Grève pour l'Avenir, samedi 9 avril 2022. KEYSTONE
Retraites 

Il est possible de garantir sur le moyen terme une stabilité de l’édifice AVS sans user et abuser d’artifices antisociaux. Le plus évident d’entre eux: augmenter l’âge de la retraite, d’abord pour les femmes, puis pour tout le monde. Gauche et syndicats ont lancé mardi une initiative pour affecter une partie des bénéfices de la Banque nationale suisse (BNS) au premier pilier du système de prévoyance.

Tactiquement, la manœuvre est habile. Pour plusieurs raisons. Elle apparaît comme indolore pour le porte-monnaie, même si ce n’est pas tout à fait le cas. L’initiative garantit certes que la part versée aux cantons – 4 milliards de francs – demeure, mais les versements extraordinaires, comme lors de la dissolution de certaines réserves en or, pourraient être affectés.

En deuxième lieu, l’initiative s’inscrit dans une logique de redistribution de richesses. Les milliards amassés par la BNS – sa fortune est de 1000 milliards de francs, sous forme de placements, de devises et de réserves en or! – sont le fruit de placements spéculatifs. Ils appartiennent collectivement aux Suissesses et aux Suisses. Rendre une partie de cet argent à la population de manière égalitaire est donc salutaire.

Les rentes servies par l’AVS sont en fait un salaire différé. L’initiative contribue – un peu – à corriger une tendance lourde de nos économies qui voit la part des gains de productivité être versée dans une proportion toujours plus importante au capital et moins aux salaires.

On ne pourra en revanche pas s’empêcher de relever une faiblesse à ce texte. Il se concentre sur l’AVS, alors que d’immenses besoins sociaux et environnementaux existent, à commencer par l’accès à des logements à des prix abordables et, surtout, en termes de réponses aux défis climatiques. C’est une mutation profonde de notre appareil de production et de nos infrastructures en matière de logement, d’énergie et de mobilité qui doit être mise en œuvre.

Une des sources de financements potentielle va en partie être affectée au système de prévoyance. Sans que l’on se pose d’ailleurs la question de son caractère pérenne – il s’agit tout de même de spéculation – et de son acceptabilité sur le long terme, alors que c’est bien avec un système marchand qui nous a mené dans l’impasse qu’il s’agit de rompre.

Et, surtout, sur le court terme, le risque est qu’on se rabatte sur l’autre source de financement pouvant rapidement être mise à contribution: le relèvement de la TVA. Et alors, vu le caractère antisocial de cette taxe, ce sont les revenus modestes qui seront mis prioritairement à contribution. Une vision plus globale – proposée d’ailleurs vainement par une minorité syndicale – eut sans doute été souhaitable. Ce qui n’enlève toutefois rien aux questions immédiates soulevées par ce texte.

Opinions Édito Philippe Bach Retraites  AVS

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