On nous écrit

Efficience thérapeutique

Une lectrice s’inquiète des restrictions et contrôles imposés par sa caisse maladie.
Caisse maladie

C’est quoi l’efficience thérapeutique? Qui la définit et en fonction de quels critères?

Nous avons reçu, mes enfants et moi-même, un courrier de notre assurance complémentaire (le Groupe Mutel), contractée il y plus de vingt ans, pour nous demander de limiter notre «consommation» de médecine douce (massage, ostéopathie, acupuncture). Ceci afin, selon la missive, de limiter l’augmentation des primes.

En me renseignant auprès de ma caisse, j’apprends que le traitement prodigué par le thérapeute doit montrer son «efficience thérapeutique». Par exemple, si je consulte mon ostéopathe pour des douleurs chroniques dues à une surcharge de travail récurrente, je pourrais le faire un certain nombre de fois (combien? une fois comme l’un de mes enfants?). Si je dépasse une certaine quantité de séances, la caisse maladie peut demander un rapport au thérapeute. Ce dernier devra justifier la poursuite du traitement. Ensuite, le médecin-conseil de la caisse pourra décider que ce traitement est inapproprié et inefficace car utilisé plusieurs fois sans résultat et refuser le remboursement partiel des factures.

Or si je consulte un thérapeute (massage, ostéopathe ou acupuncteur), c’est bien pour pouvoir supporter, sur le long terme, le stress occasionné par le travail et la vie en général. Ces soins me permettent de travailler, de m’occuper de ma famille. Ce faisant, je ne consomme pas de médicaments et j’évite un arrêt de travail. Par conséquent, je coûte moins cher à la société.

J’imagine que M. Thomas Boyer, directeur du Groupe Mutuel, qui a vu son salaire passer d’un peu moins d’un demi-million en 2016 à 780’000 francs en 2022 (soit une augmentation de plus de 50% en l’espace de quelques années), n’a pas besoin de se faire rembourser partiellement sa facture quand il consulte un ostéopathe. Et que son salaire lui permet d’aller régulièrement au spa pour se détendre. Idem pour le CEO de Sanitas, M. Andreas Schönenberger dont la rémunération est passée de 660’000 francs à près d’un million l’an dernier.

Par contre, les petites gens, au salaire modeste, qui économisent pour avoir une assurance complémentaire, comptent assurément sur un remboursement partiel de leur facture pour les médecines douces.

Quand on sait que les assureurs sont assis sur une montagne de 8,3 milliards de francs, qu’ils boivent le champagne avec nos parlementaires à Berne, nous sommes choqué·es de recevoir une telle lettre intimidante.

Si les compagnies d’assurance imaginent que notre «consommation» en soins thérapeutiques est abusive, peut-être pourraient-elles se battre pour que les ouvriers et ouvrières travaillent moins, reçoivent un salaire décent leur évitant de cumuler plusieurs emplois, aient un soutien de l’Etat pour la garde des enfants, puissent habiter dans un logement salubre. Alors, là, peut-être que nous aurons moins besoin d’aller consulter notre thérapeute.

Mais n’oublions pas que dans une logique capitaliste cela sera toujours l’argent qui dictera l’Efficience et non l’humain.

Clémence
*pseudo (nom connu de la rédaction)

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