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La diaspora juive ciblée à cause de la politique israélienne

En prétendant agir au nom de son peuple, le gouvernement israélien serait à l’origine d’un amalgame stigmatisant. Réponse à un courrier reçu et publié vendredi dernier.
Proche-Orient

L’article «Israël-Palestine: et l’humain dans tout ça?» m’a interpellé à plusieurs niveaux. Tout d’abord, je salue les positions exprimées par le collectif «Israël: et l’humain dans tout ça?» réclamant un cessez-le-feu, condamnant les colonies israéliennes illégales et souhaitant que les peuples dans cette région puissent vivre en paix. Cependant, je ne pourrais imaginer l’instauration d’une paix durable sans que celle-ci ne repose sur la justice et le respect de chacun.

L’attaque meurtrière du Hamas le 7 octobre doit être replacée dans son contexte historique de presque un siècle de souffrance imposée au peuple palestinien, chassé de sa terre et soumis soit à l’exil, soit à une occupation militaire brutale. Certes, pendant l’attaque du 7 octobre le Hamas a commis des crimes de guerre qui doivent être condamnés, mais cela ne peut justifier ni les exactions de l’armée israélienne à Gaza ni les agressions perpétuées contre la population palestinienne en Cisjordanie.

En prétendant agir au nom de tout le peuple juif, la politique du gouvernement israélien crée un amalgame qui pèse sur la diaspora juive. Malheureusement, dans certains cas, ceci donne un prétexte aux personnes antisémites de passer à l’acte. L’antisémitisme, comme toute forme de racisme, doit être condamné et son auteur traduit en justice. Je milite régulièrement depuis plus de vingt ans au sein des organisations qui revendiquent le respect des droits inaliénables du peuple palestinien, tout en combattant toute forme de racisme. Dans ce cadre, quiconque formulant un slogan ou portant une pancarte raciste a été immédiatement isolé par son entourage et évacué manu militari de l’événement. C’était le cas hier, c’est le cas aujourd’hui et ce sera le cas de demain.

Je me permets de mettre en doute, comme bien d’autres, l’idée d’une solution à ce conflit par la création de deux Etats. Par l’établissement massif des colonies illégales en Cisjordanie, Israël a sciemment rendu impossible la création d’un Etat palestinien viable. A mon avis, seul un Etat dans lequel les citoyens et citoyennes jouissent non simplement des mêmes droits, mais aussi où le respect des spécificités de chacun est garanti, offrira la possibilité enfin d’une paix juste et durable dans cette région ô combien déchirée. Le slogan «From the river to the sea, Palestine will be free», qui ne relève ni de l’antisémitisme ni de l’expulsion de la population juive, évoque cette possibilité. C’est un appel à démolir les barrières entre les peuples qui, à l’instar de nous tous et toutes, aspirent à vivre sereinement.

Concernant la haine citée dans l’article en question, je me base sur mon expérience personnelle. Avec mon épouse, nous sommes allés dans les territoires occupés de Cisjordanie avec des missions civiles pendant dix ans (2006-2016) et nous n’avons jamais caché le fait que nous étions juifs. Nous n’avons jamais eu le moindre problème avec les Palestiniens que nous rencontrions. Partout les Palestiniens nous ont expliqué qu’ils n’avaient aucun problème avec les personnes juives, mais qu’ils luttaient contre la spoliation et l’occupation militaire par l’Etat d’Israël. En fait, la seule et unique fois que nous avons vécu un incident violent sur place, il a été provoqué par un soldat israélien à Hébron.

L’auteur est militant, de Tannay (VD) et membre du Collectif Urgence Palestine.

Opinions Agora Nathan Finkelstein Proche-Orient

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