«La seule occupation légitime: celle de l’UNIL et des autres universités»
Depuis jeudi 2 mai, des étudiant·es ont entamé une occupation pacifique du bâtiment Geopolis de l’université de Lausanne (UNIL). En premier lieu, ils et elles revendiquent un boycott des institutions universitaires israéliennes auprès de la direction de l’UNIL, ainsi qu’une prise de position dénonçant la destruction des universités à Gaza et le meurtre des académiques gazaoui·es. A la suite de la mobilisation lausannoise, d’autres universités suisses ont vu s’amorcer des mouvements similaires d’occupation de bâtiments, comme l’université de Genève et les écoles polytechniques fédérales de Lausanne (EPFL) et de Zurich (ETHZ). Ces mobilisations étudiantes s’inscrivent dans la vague des mouvements d’occupation au sein des universités américaines et françaises en solidarité avec le peuple palestinien, appelant à un «cessez-le-feu immédiat» et à la fin des liens académiques avec les institutions israéliennes.
Malgré les tentatives répétées d’une grande partie de la presse dominante en Suisse – notamment la RTS et Le Temps – de discréditer l’occupation étudiante à l’UNIL (comme d’ailleurs le reste du mouvement en solidarité avec la Palestine), les étudiant·es mobilisé·es ont développé une auto-organisation et un fonctionnement démocratique remarquable à tous les niveaux, en un temps record. Ils et elles ont à la fois veillé à la continuation des cours dans le bâtiment, tout en s’assurant que la sécurité du lieu ne soit pas remise en cause, et en maintenant le dialogue ouvert avec la direction de l’UNIL. De même, l’occupation a organisé des conférences en direction d’un public large sur des thématiques multiples, assumant une forme d’éducation populaire. De même encore, au sein de l’occupation, on peut retrouver des étudiant·es de toutes confessions et milieux culturels, reflétant la diversité de l’université et interagissant de manière respectueuse. Une charte éthique, qui dénonce tout comportement violent, raciste, sexiste, etc., a été mise en place.
On est très loin, dès lors, des accusations médiatisées dénonçant la «violence» de l’occupation de l’UNIL ou le fait qu’elle empêcherait le corps enseignant de travailler. A ce propos, relevons simplement que déjà plus de 260 membres du corps enseignant de l’UNIL ont signé une pétition soutenant l’occupation et les revendications des étudiant·es mobilisé·es.
De fait, comment les communautés étudiante et enseignante ne pourraient-elles pas s’indigner devant une guerre à risque génocidaire, tel qu’énoncé par la Cour internationale de justice, et débouchant sur un «scolasticide» en cours dans la bande de Gaza? L’armée d’occupation israélienne a en effet détruit toutes les universités de l’enclave palestinienne par des bombardements aériens ou des destructions ciblées, et assassiné plusieurs centaines d’universitaires et des milliers étudiant·es.
Par leurs demandes de boycott institutionnel des universités israéliennes – et non des chercheur·ses et des individus israéliens – les étudiant·es mobilisé·es en Suisse cherchent à remettre en cause le mythe des universités israéliennes «îlots de liberté et d’opposition», lié de manière indissociable à l’autre mythe de la «démocratie israélienne». Les universités israéliennes jouent en effet un rôle de soutien actif à l’Etat d’apartheid et colonial israélien et à son armée d’occupation. Elles participent à la planification, la mise en œuvre et la justification de l’occupation israélienne et des politiques d’apartheid. De plus, ni les syndicats enseignants ni les syndicats étudiants ou associations professionnelles universitaires n’ont jamais dénoncé les crimes et violations des droits humains à l’encontre les académiques palestinien·nes.
Oui, nous devons soutenir l’occupation de l’UNIL et des autres universités par des étudiant·es conscientisé·es, ainsi que leurs revendications légitimes. Et saluer leur juste indignation contre une «guerre génocidaire» et la «complicité des Etats occidentaux» et leurs institutions. Ces mobilisations historiques s’inscrivent dans le sillage des mouvements passés d’opposition à la guerre au Vietnam, de boycott de l’apartheid en Afrique du Sud, d’opposition à la guerre en Irak… aujourd’hui loués pour leur courage et leurs positions politiques dans la grande majorité des livres d’histoire. La seule occupation légitime, ce sont les occupations étudiantes, à l’UNIL et ailleurs.