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Au bord du précipice

Cette chronique littéraire a été écrite par une étudiante en Lettres de l’université de Genève, dans le cadre de l’atelier d’écriture animé par Eleonore Devevey et Natacha Allet.
Au bord du précipice
Nouvelles

Quel est le point commun entre un accident mortel et un panier de basket? Dans Cascade, recueil de nouvelles de Craig Davidson (auteur d’Un goût de rouille et d’os), tous deux sont symboles de basculement. Sous le bruit constant des chutes du Niagara, on explore Cataract City, ville fictive bordée par une rivière de déchets toxiques, suivant pendant quelques heures l’assistante sociale, le chauffeur de car ou le chirurgien.

Dans ce décor sinistre, chaque personnage est sur le point de voir sa vie bouleversée. Ces instants clés nous sont livrés au travers d’un récit entrecoupé de souvenirs embrumés et d’hallucinations, les nouvelles fourmillant de détails qui permettent d’épouser la vision fragmentée et quelquefois confuse des protagonistes. Le jargon précis et professionnel qu’ils emploient les singularise tout en leur conférant une dimension hyperréaliste, au risque de perdre les lecteur·trices qui peinent parfois à saisir l’image d’ensemble. La puissance du recueil réside dans un procédé récurrent: la narration se fige et se clôt un instant avant le dénouement. En quittant chaque personnage si brusquement, Davidson nous octroie le privilège d’un choix – la chute ou l’envol. Malgré l’inachèvement du récit, on referme le livre sans amertume. L’écriture laisse juste assez de place pour un doute: et si, cette fois, ils tombaient bel et bien?

Recueil au style mordant, Cascade permet de se questionner sur la vulnérabilité et l’instabilité de la vie. L’occasion idéale de se promener, là, juste au bord du précipice.

Craig Davidson, Cascade, tr. de l’anglais par Héloïse Esquié, Albin Michel, 238 pp.

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