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«Lausanne Cités», officine de la propagande UDC?

Hugues Poltier réagit à une publication de l’hebdomadaire gratuit Lausanne Cités qui ressemble, à ses yeux, à un appel à interdire la promotion du communisme adressé à la Ville de Lausanne.
Canton de Vaud

Lausanne Cités, cet hebdomadaire gratuit distribué dans la région lausannoise depuis 1980, appartenant à un certain Jean-Marie Fleury [également propriétaire du GHI] et bénéficiant d’un soutien de la Ville de Lausanne depuis 2018, est-il en train de devenir une vitrine pour la propagande de l’UDC?

Les nombreux articles dans lesquels des politiciens UDC sont invités à librement cogner sur la politique migratoire du canton autorisent à le penser. Un article de la semaine dernière (numéro du 18-19 octobre 2023), sous le titre aguicheur et jouant l’indignation «Tags et affiches bolchéviques sont tolérés à Lausanne» ne fait que renforcer cette interprétation.

A tout le moins, il n’est pas douteux que cette indignation devant cette tolérance marque une droitisation toute de ce tout-ménage et un appel à la fin du libéralisme politique dont nos sociétés «libérales» se prévalaient fièrement tout au long de la dite Guerre froide. Le verbe «tolérer» employé dans le titre suggère bien qu’aux yeux du journal, l’objet de cette tolérance serait intolérable: promouvoir le communisme, ce serait promouvoir une idéologie criminelle, à l’égal du nazisme, promotion largement proscrite lorsqu’elle n’est pas prohibée.

L’implicite ici: si on ne tolère pas le second, comment se fait-il que nous tolérions le premier? On aura reconnu l’argument de la symétrie des extrêmes, au nom duquel on devrait avoir la même tolérance zéro en matière de propagande – argument que vient étayer le rapprochement du nombre des morts historiquement causés par chacun des camps.

Argument pourtant profondément et délibérément malhonnête: le communisme n’a jamais appelé à l’écrasement et à l’élimination d’un quelconque groupe humain; il n’a jamais promu d’idéologie raciste-suprémaciste. Que les pays dits «communistes» aient fini par mener des politiques à bien des égards criminelles, cela ne fait aucun doute et est abondamment documenté et étudié par les historiens. On se contentera ici d’y renvoyer.

Reste ce fait que les politiciens cités dans Lausanne Cités font mine d’oublier: ce qui est constitutif de l’idéologie nazie, c’est précisément le discours de la supériorité d’une race humaine sur toutes les autres, avec tout ce qui s’ensuit, c’est à dire le droit de cette «race supérieure» de disposer des «races inférieures» selon son bon plaisir, jusqu’à l’extermination si tel est son «plaisir»; et ce qui est constitutif, à l’inverse, de l’idéologie communiste – l’affirmation forte du principe de l’égalité de tous les humains, quels que soient leur race, leur genre, leur origine, leur religion, etc. Le communisme fut – et demeure – la première et la seule idéologie universaliste.

Prétendre la criminaliser au nom des crimes – avérés, certains, indubitables, encore une fois – de chefs des pays dits communistes est un double crime: contre l’esprit et contre l’espoir de l’émancipation d’un régime de moins en moins «libéral» – voyez la multiplication des «procès-bâillons», et de plus en plus soumis sans partage aux intérêts et visées du capital. Les politiciens cités dans ce papier ne veulent rien moins que la fin de la liberté d’expression pour les voix de l’émancipation. Et pour elles seulement. Les criminaliser est l’objectif de ces tristes sires – Olivier Meuwly («historien» PLR) et Valentin Christe (UDC) – auxquels l’hebdomadaire lausannois, soutenu par la municipalité, donne la parole sans la moindre distance critique, ni vergogne.

Pareil faux pas justifie de demander à la municipalité d’exiger auprès des ayants droit du titre de démettre séance tenante son rédacteur en chef et de le remplacer par un autre qui n’aura pas cet agenda liberticide et udéciste. Ou alors d’annuler son soutien financier avec effet immédiat.

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