La poste met le paquet
Les tarifs de la Poste vont augmenter en 2024. Le prix des lettres en courrier A passe de 1,1 franc à 1,2 franc et le courrier B progresse de 90 centimes à 1 franc. Le phénomène est similaire pour les petits colis.
C’est moins que ce qu’espérait le géant jaune qui a dû rabattre ses prétentions telles qu’initialement formulées de quelque 70 millions de francs, pour un total de 182 millions de francs que devait rapporter la réforme tarifaire. Le surveillant des prix est passé par là et a mis son veto. Tant mieux pour les entreprises mais, pour le reste, la nouvelle laisse un goût amer.
Le solde du déficit annoncé? Il sera économisé à l’interne, c’est-à-dire sur les dos des salarié·es prié·es de faire plus avec moins. Et sur celui des usager·ères. Les prestations de la Poste se sont dégradées depuis une vingtaine d’années: diminution drastique du nombre de bureaux postaux, distribution de plus en plus tardive du courrier, etc. Des ballons d’essai sont régulièrement lancés avec, par exemple l’idée de réduire la desserte des régions périphériques avec une livraison un jour sur deux seulement. Ou en retardant encore l’heure de distribution. Ce qui menace la survie des journaux.
D’un point de vue commercial, l’étouffoir mis sur l’ex-service public est contestable. Augmenter les tarifs ne fera pas revenir une clientèle qui a déjà tendance à fuir. De plus en plus de factures sont envoyées sous forme électronique. Ce qui pose des problèmes aux seniors, moins à l’aise avec ce type d’outils et à qui on ne demande souvent pas leur avis.
Mais la Poste a-t-elle le choix? Pas tellement. Lorsqu’à la fin des années nonante le parlement a décidé de privatiser l’ex-régie publique au nom du new public management, il a liquidé en bonne et due forme un acteur majeur de la cohésion sociale et du rôle de l’Etat en matière de prestations. C’est un choix. Que la gauche institutionnelle s’y soit ralliée n’est qu’un reniement parmi d’autres.
L’ouverture de ce secteur au vent concurrentiel du grand large a vu les activités rentables être capturées par le privé. Il est aujourd’hui plus simple, plus rapide et souvent moins cher de passer par DHL ou DPD pour faire livrer des paquets. Le restant de la colère de Dieu – les activités déficitaires comme les lettres – restent en mains publiques. A elles de se débrouiller.
Les mouvements de menton du surveillant des prix tiennent de la posture; cet arbitre de la concurrence et de l’intérêt public joue avec des dés pipés. Il met l’accent sur un aspect du problème, sans prendre en considération le tableau dans sa globalité. Il n’est pas nécessaire d’en être dupe.