Genève

Mobilisation pour demander la libération de Jérémy

Quelque 200 personnes ont manifesté pour demander la libération du militant pour le climat. Soupçonné d’avoir endommagé des engins de chantier, il est emprisonné depuis 75 jours.
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Genève, le 2 juin 2023 Manifestation pour soutenir Jérémy, jeune activiste du climat emprisonné. © Cédric Vincensini
Climat

Mamans, parents, ami·es, enfants, et surtout beaucoup de jeunes adultes: environ 200 personnes ont manifesté vendredi soir à Genève pour demander la libération de Jérémy*, militant pour le climat âgé de 23 ans, incarcéré à la prison de Champ-Dollon depuis 75 jours.

Il est soupçonné par la justice d’être à l’origine d’un incendie, en janvier 2022, qui a détruit deux véhicules sur le site de la gravière de Sézegnin, propriété du cimentier Lafarge-Holcim. On lui reproche également le sabotage d’engins de chantier. La justice a argué d’un risque de collusion pour justifier son maintien en détention.

Aux alentours de 18h30, une foule gaie mais déterminée, munie de pancartes et autocollants «Free Jérémy» s’est retrouvée devant la poste du Mont-Blanc. Après les Pâquis et les Rues Basses, la manifestation se terminera peu avant 21h en Vieille-ville, devant le Palais de justice, par un rap revendicatif et mobilisateur.

Dans la foule, des proches. A commencer par la maman du jeune incarcéré, qui livre un témoignage émouvant et courageux. «Je ne comprends pas l’acharnement du Ministère public vis-à-vis de mon fils. Tout le monde ne vous en dira que du bien.»

Elle évoque une grande fatigue, un sentiment d’impuissance et l’angoisse qui la ronge. Mais aussi «une lutte d’amour et de révolte, pour un monde plus juste, pour tous nos enfants». Elle a découvert les affres des visites en prison. «Nous sommes une grande famille, je ne peux le voir qu’une heure par mois, au parloir. Mon fils est très courageux, j’ai beaucoup d’estime pour tout ce qu’il est, a été et sera. Nous serons là pour l’accueillir à sa sortie.» «C’est beau ce que vous faites», lui glisse une femme.

Carnets de notes subtilisés

Nous rencontrons Anne-Laure Cezard, professeure et amie de la famille, venue exprès de Lyon avec sa fille. «Un jeune de 23 ans qui défend des idées aussi fondamentales que l’avenir de la planète n’a rien à faire en prison», affirme-t-elle. Elle juge le traitement infligé au détenu totalement disproportionné par rapport à ce qui lui est reproché. «On le connait très bien, ce n’est pas un délinquant, il se bat pour les autres. Les dirigeants d’Holcim n’ont jamais fait un jour en préventive, eux, malgré tous les dommages qu’ils causent.»

Pour Elise, membre du comité de soutien de Jérémy, il s’agit d’une «arrestation politique»: «La justice tente de réprimer tout un mouvement à travers un seul individu.» Récemment, les cahiers de notes de Jérémy ont été subtilisés par les gardiens en son absence et versés au dossier. Le jeune homme y retranscrivait notamment ses entretiens avec ses avocat·es. Qui ont demandé leur mise sous scellés, la mesure étant jugée aussi inédite qu’illégale.

Au micro, une manifestante cite l’ex-ZAD du Mormont et les demandes d’agir concrètement en faveur de l’environnement laissées sans réponse par les autorités: «Une génération a compris qu’il faudra une pluralité de tactiques pour obtenir un écho sérieux au sein de la classe politique.»

«Qu’il passe l’été avec nous»

Quant au risque de collusion justifiant le maintien en détention de Jérémy, il ne tient pas la route, à entendre ses soutiens. Les faits remontent à janvier 2022. Or la police, malgré un mandat d’amener datant de juin de la même année, aurait attendu neuf mois avant d’arrêter le militant pour les faits incriminés. Sous-entendu: les éventuel·les complices auraient eu tout le temps d’accorder leurs versions.

Interpellé le mois dernier par Le Courrier, le Ministère public avait précisé ne pas vouloir «commenter les allégations de manifestants, fussent-elles grossièrement erronées». Il se prononcera d’ici au 15 juin prochain sur une éventuelle prolongation de détention. Une option que peine à envisager la maman de Jérémy: «Le temps est de plus en plus long. Nous sommes suspendus à cette décision, ce n’est plus tenable.» Son vœu? «Sa libération immédiate et qu’il passe l’été avec nous.»

*prénom d’emprunt

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