Un premier mai historique
Le pouvoir empêche les manifestants d’approcher les ministres, le président. Les médias montrent des échanges favorables qui laissent l’impression que Macron ne s’en sort pas si mal. La contestation importante dure, mais elle est pourtant progressivement banalisée, minimisée. Le discours diffusé sur les chaînes françaises est très orienté, mais qui choisit son contenu?
Sur les réseaux, un foisonnement de courtes vidéos montre une autre France, une autre histoire qui se déroule même si le pouvoir cherche à la réduire au silence, à l’étouffer, à la fatiguer. Deux mondes se côtoient et ne se parlent plus, chacun exige de l’autre qu’il se plie à sa réalité. Macron et ses ministres souhaitent que la population reconnaisse cette réforme comme parfaitement démocratique. Ceux qui s’enflamment, qui crient, souffrent, ne veulent plus être broyés par le système et comprennent que ce qui est démocratique n’est pas forcément légitime.
Dans quelle autre démocratie une opposition si profonde ne serait absolument pas entendue?
Depuis la Suisse, quelques courtes informations sont diffusées occasionnellement. C’est un pays voisin, ami, qui s’enflamme, mais le traitement dans nos médias est minimaliste. Que fera la Suisse si des Français demandent l’asile politique?
Des violences policières se sont installées, elles sont soutenues par un pouvoir si éloigné de son peuple qu’il ne peut plus sentir de l’empathie pour lui.
Comment pouvons-nous ignorer autant cette France en feu? Est-ce que la Suisse est atteinte du même mal? Le pouvoir préservé avant le bien-être de la population? La masse hurlante n’est pas démocratique. La foule même agissante n’est que le sujet de ses maîtres. Est-ce que la démocratie se meurt?
L’article 49.3 en France, le droit d’urgence en Suisse, les parlements muselés sont aussi des signes inquiétants, est-ce qu’on recule? Les libertés diminuent, s’effondrent. Les plus modestes vont tous mourir au travail pour financer les retraites des plus aisés. La démocratie n’est plus qu’un concept de façade qui permet à une oligarchie de plus en plus vorace de se gaver copieusement sans limite.
Ce monde vacille, est-ce qu’un effondrement est encore évitable?
Sommes-nous capable d’autre chose que le pire?
Est-ce que toutes les civilisations sont vouées à disparaître?
Les cerisiers en fleurs, le retour des hirondelles, le printemps déjà caniculaire, dorénavant, plus rien ne peut nous rassurer.
Janique Perrenoud,
La Chaux-de-Fonds