Édito

Le potentiel est là

Le potentiel est là
L’ampleur de la mobilisation est révélatrice d'un ras-le-bol populaire très largement partagé. KEYSTONE
France
Entre 1,1 million (selon le Ministère de l’intérieur) et 2 millions de Français·es (selon les syndicats) ont manifesté ce jeudi contre la réforme des retraites. Un mouvement social massif, à quelques jours du vote du projet par le parlement français. L’ampleur de la mobilisation est révélatrice du ras-le-bol populaire très largement partagé, y compris par les médias qui n’ont guère embouché les habituelles trompettes progouvernementales.
Une victoire de taille pour les syndicats qu’Emmanuel Macron tente, avec une belle constance, de court-circuiter dans un projet de société qu’on dirait tout droit sorti des manuels de Ronald Reagan ou Margaret Thatcher. Sauf que le néolibéralisme est en fin de cycle. Et la Macronie en panne, elle qui gouverne à coup de 49-3, ce dispositif qui permet à l’exécutif de passer en force. Sans majorité parlementaire, dans un climat social explosif, osera-t-elle recourir encore une fois à cet outil peu démocratique? Permettons-nous de douter de l’intelligence d’une telle manœuvre, qui peut provoquer la chute du gouvernement.
Des masques sont en train de tomber. Et notamment le caractère réactionnaire du projet d’Emmanuel Macron. Relever à 64 ans l’âge de la retraite comme il le défend montre bien où sont ses priorités. Aider les plus riches à coup d’abattements fiscaux et faire payer la douloureuse aux revenus normaux.
Et lorsque ceux-ci, pris à la gorge par l’inflation et l’envol du coût de la vie, renâclent, c’est qu’il faut faire preuve de «pédagogie». En clair, la plèbe est trop bête pour comprendre. Comme elle aurait mal compris son discours de Nouvel An, lors duquel il découvrait pompeusement la Lune, pardon, le réchauffement climatique. Son mépris du peuple, qui est aussi un mépris de la démocratie, finit par se voir.
D’autant plus que les institutions sont à bout de souffle. Emmanuel Macron a été mal élu, par défaut, via un vote barrage contre l’extrême droite et en profitant du jeu arithmétique de la majoritaire à la française. Il se retrouve sans majorité parlementaire. Un grand coup de sac politique n’est pas à exclure. Qui en bénéficiera? L’extrême droite «dédiabolisée» qui se tient en embuscade ou la gauche en pleine recomposition?
L’ampleur du mouvement social de jeudi montre en tous les cas que le potentiel du camp progressiste est là pour offrir une alternative crédible au vaisseau fantôme de la Macronie qui n’a guère à offrir, à part du storytelling creux. C’est sans doute la meilleure nouvelle de la journée.
Opinions International Édito Philippe Bach France Réforme des retraites

Autour de l'article

Historique mobilisation

jeudi 19 janvier 2023 Clément Pouré
Selon les syndicats, plus d’un million quatre cent mille personnes se sont mobilisées jeudi à travers toute la France contre la réforme des retraites. Le début d’un combat de longue haleine.

Connexion