Édito

Quelle autonomie pour les hautes écoles?

Quelle  autonomie pour les hautes écoles?
Le hall et l'intérieur du bâtiment de l'Unimail, Université de Genève. PHOTO PRETEXTE/KEYSTONE-ARCHIVES
Hautes écoles

Le Conseil d’Etat genevois a retoqué mercredi le candidat au poste de recteur pressenti par l’Assemblée de l’université. Une décision qui pose des problèmes institutionnels et politiques.

Du strict point de vue de la loi, on peut admettre que, nonobstant les cris d’orfraie des différents corps de l’alma mater courroucés que leur choix puisse être questionné, le gouvernement genevois est dans les clous. Le dispositif réglementaire prévoit que c’est l’autorité de tutelle – l’exécutif – qui a le dernier mot; il est malvenu de lui reprocher ensuite d’avoir exercé ce droit régalien. Tel est le cas pour les établissements autonomes, qu’il s’agisse de santé, d’énergie ou de mobilité. L’exécutif donne les clés de ces entités à des personnes qui ont son aval et sont à même de porter sa vision.

D’autant plus qu’il avait annoncé la couleur. L’université n’a pas voulu ou pas pu en tenir compte. Il lui était demandé de présenter quelqu’un maîtrisant les arcanes du monde politique et académique suisse, ce qui n’était pas le cas du candidat choisi par l’université. Le problème est aussi du côté de l’alma mater.

Il va falloir remettre l’ouvrage sur le métier pour trouver la perle rare. En attendant, le sortant Yves Flückiger devra jouer les prolongations. On lui en saura gré. Il a le souci de l’institution. Mais, et c’est sans doute là que le bât blesse: personne du sérail n’a su dégager un consensus autour de sa personne. Qui nous dit que la donne va changer?

Bref, des tensions sont annoncées. Prévisible, le reproche d’une Genève provinciale, repliée sur elle-même, incapable de s’ouvrir au monde, est déjà sur la table. A juste titre? Pas forcément. La volonté un brin autoproclamée des tenants de cette vision d’une Uni jouant dans la cour mondialisée des plus grands s’inscrit aussi dans une approche non exempte d’aveuglement. Et qui a pu montrer ses limites, voire desservir certains intérêts de la Suisse.

Cette dernière a ainsi pris du retard et bradé certaines compétences dans des domaines où elle excellait. On songe notamment à l’ingénierie des barrages, des tunnels ou même du solaire, qui seraient bien utiles en ces temps de crise climatique, pour se lancer dans des domaines certes nouveaux et porteurs, mais où elle peinera à régater avec les géants mondiaux de l’industrie du savoir.

La période de crise qui s’annonce sera-t-elle l’occasion de tirer le bilan du processus de Bologne et de la marchandisation de la formation qu’il impliquait? On peut le souhaiter. Mais il est plus probable que les débats vont se cantonner à des questions plus idéologiques et peineront à aborder ces enjeux de fond.

Opinions Édito Philippe Bach Hautes écoles

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