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De Salvador Allende à Gabriel Boric

Depuis quelques années, le regain de forces populaires et progressistes chiliennes attire de nouveau les regards. Plongeant dans l’histoire du pays, le dernier numéro de Manière de voir permet de mieux comprendre les soubresauts que traverse l’ancien «laboratoire du néolibéralisme».
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Depuis longtemps, le Chili passionne. Au début des années 1970, l’expérience de «voie démocratique vers le socialisme» dans laquelle il s’engage sous la houlette de Salvador Allende fascine la gauche: le socialiste français François Mitterrand, par exemple, explique trouver dans l’Unité populaire une source d’inspiration lors d’un voyage sur place, en 1971. Deux ans plus tard, le coup d’Etat du général Augusto Pinochet fauche l’espoir qui avait gonflé au-delà des frontières de l’étroite bande de terre chilienne. Chacun mesure que l’épreuve imposée au pays vise à enseigner une leçon aux peuples du monde entier: qu’ils tentent de s’émanciper et ils trouveront sur leur chemin lunettes noires, mines patibulaires et mitraillettes.

En dépit du catéchisme néolibéral sur lequel repose la «transition vers la démocratie» qui débute en 1990, les forces progressistes chiliennes brandissent de nouveau le flambeau de l’espérance à l’orée du XXIe siècle. Etudiants, féministes, syndicalistes… Une coalition de forces hétéroclites prend alors la rue pour dénoncer les vestiges de la dictature dans le Chili moderne. En quelques années, elle parvient à écrire l’histoire: réhabiliter la figure d’Allende; élire un président de gauche, M. Gabriel Boric; obtenir qu’on change la Constitution léguée par la junte. La décision des électeurs de rejeter, le 4 septembre 2022, un premier projet de Magna Carta marque-t-elle un coup d’arrêt aux victoires de la gauche? Plongeant dans l’histoire du pays, la nouvelle livraison de Manière de voir apporte les éléments qui permettront à chacun·e de forger sa réponse à la question.

Le premier chapitre rappelle que la victoire d’Allende ne constitue pas une rupture avec l’histoire politique du Chili. Convaincue de l’urgence sociale, une fraction de la droite vient de tenter de réformer le pays, sans succès. L’Unité populaire ambitionne de se montrer plus déterminée. Consacré à la période de la dictature (1973-1990), le deuxième chapitre de cette livraison permet de mesurer l’ampleur de la violence que sont disposés à déchaîner les adversaires de l’émancipation – témoignages de première main à l’appui. Le dernier chapitre documente la formidable transformation que connaît le Chili depuis l’émergence des mouvements d’étudiants: des étudiants que Le Monde diplomatique connaît bien puisqu’ils collaborent depuis longtemps à son édition chilienne. A commencer par le nouveau président, M. Boric, auquel l’équipe de Santiago souhaitait récemment de «concrétiser les rêves exposés» dans ses articles pour le «Diplo».

«La bataille pour le Chili», Manière de voir no 185, oct.-nov. 2022, bimestriel édité par Le Monde diplomatique, www.monde-diplomatique.fr

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