Surpoids: pourquoi tant de haine
L’été, l’éloge des corps minces bat son plein. Et les injonctions sont partout, des magazines qui vantent les nouveaux régimes aux vêtements taillés au plus près, en passant par les jugements qui filtrent de nos regards scrutateurs formatés par des décennies de culte du corps. C’est à cette occasion que Le Courrier a choisi d’explorer la grossophobie, discrimination des personnes qu’on perçoit comme ayant un poids trop élevé.
Le corps mince calibre la taille des sièges dans l’avion ou celle des tourniquets d’entrée à la piscine, il habille la mode, il s’apparente à un statut social. Dans ce monde-là, la stigmatisation guette les personnes grosses.
Or, le surpoids et l’obésité font l’objet de nombreuses idées reçues. Non, l’obésité n’est pas le fruit coupable d’une voracité incontrôlée mais une maladie chronique, récidivante, complexe et multifactorielle, que l’on ne combat pas à coups de régimes. Or, si l’OMS l’a considérée comme telle en 1997 déjà, ce n’est qu’en 2013 que l’American Medical Association a franchi le pas. Un retard qui compte pour la population étasunienne très touchée par cette réalité, notamment en termes de prise en charge médicale.
Si l’obésité et le surpoids ont un impact sur le développement d’autres maladies, telles le diabète ou les maladies cardiovasculaires, la grossophobie, elle, engendre de la phobie sociale, des troubles anxieux, de la dépression, voire des suicides. Elle peut conduire à éviter les cabinets médicaux, par crainte de remarques déplacées ou de matériel inadapté, ce qui implique des retards de traitements. Elle peut conduire aussi à s’isoler totalement chez soi ou à être descolarisé·es. Les jeunes et les enfants font particulièrement les frais de la stigmatisation. Or, la grossophobie, contrairement à d’autres formes de discrimination, est encore acceptée socialement. Insulter quelqu’un à cause de son poids est trop souvent pris à la légère. Les conséquences sont pourtant dramatiques.
Des voix commencent à s’élever, doucement, pour mettre des mots sur cette stigmatisation, sur la souffrance qu’elle engendre, avec, à la clé, une aggravation des troubles alimentaires. Il est temps de mettre fin à la grossophobie, au niveau individuel et institutionnel. Le surpoids et l’obésité sont le symptôme d’un problème de société: stress, malbouffe, insécurité économique ou sociale contribuent à renforcer le phénomène. Ce n’est pas aux personnes concernées de se remettre en question, mais à notre modèle de société.