Pour l’instant, l’asphalte des travaux joue encore les trouble-fête. Mais à terme, il sera magnifique, le périmètre de Plateforme 10, à Lausanne, avec ses deux bâtisses aux gestes architecturaux aussi forts que complémentaires. Un rectangle au sol pour le premier, celui du Musée cantonal des beaux-arts (MCBA), ouvert à l’automne 2019. Et un carré parfait pour le second, où se trouvent Mudac et Photo Elysée, présenté au public ce week-end.

Imaginer puis construire ce quartier des arts aura pris moins de quatorze ans, entre l’échec d’un projet de nouveau MCBA à Bellerive fin 2008 et les inaugurations successives des deux bâtisses près de la gare. Ceci quand bien même la construction du premier édifice a été retardée par trois ans de recours jusqu’au Tribunal fédéral. On peut ajouter que le choix du bureau Barozzi Veiga, pour le MCBA, a été annoncé à peine trente mois après la votation sur Bellerive.

A Genève, cette efficacité fait rêver, alors que le lancement d’un concours d’architecture pour le Musée d’art et d’histoire est repoussé d’année en année, six ans et quatre mois après l’échec dans les urnes du projet Jean Nouvel. Aux dernières infos, ce sera pour mai 2023, avec une ouverture prévue en 2030 et un coût total qui frisera les 200 millions. C’est davantage que la somme des deux bâtiments de Plateforme 10, mais comparaison n’est pas raison, puisque l’agrandissement genevois se double d’une restauration.

A Lausanne, il s’agit désormais de faire vivre les trois entités en garantissant indépendance et spécificités. En cela, il est dommage que le canton n’ait pas osé faire confiance aux musées: afin de s’assurer qu’ils se parlent, il a inventé un organe coupole visiblement démesuré, avec un chargé de coordination-animation mieux payé que les trois directeur·trices. Or une structure nettement plus modeste et agile suffirait certainement, qui permettrait de réorienter plusieurs gros salaires vers les équipes, pour l’instant sous-dotées.

Et puis, on apprenait cette semaine que les gardien·nes nouvellement engagé·es auront un salaire déclassé, pour des économies qui ne font pas le poids face au symbole de cet acte brutal – solidaires, plus de cent employé·es des trois musées ont protesté auprès du canton.

Plusieurs options stratégiques encore à reformuler, donc, pour le bien de la culture et de ses protagonistes. Mais dans l’immédiat, que la fête soit belle!