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Risque pour les personnes mal informées

Muriel Bros réagit à un éditorial au sujet de la votation sur le don d’organes.
Don d'organes

L’éditorial du mardi 10 mai m’a laissée très perplexe. Je me demande pour quelles raisons une vie sauvée grâce à une transplantation compterait plus qu’une vie sauvée grâce à une politique de protection de l’air efficace? Si, chaque année, septante personnes meurent pour diverses raisons et auraient pu vivre plus longtemps grâce à une transplantation, ce sont plus de 2300 personnes qui meurent prématurément chaque année en Suisse à cause de la pollution atmosphérique.

Introduire le consentement présumé, c’est prendre le risque de prélever des organes sur des personnes non informées. Ces personnes, souvent précarisées, parlant peu nos langues nationales, ne bénéficiant souvent pas d’un permis de séjour, sont bien plus invisibilisées dans notre société que la mort. Qui viendra dire que cet ouvrier travaillant au noir sur un chantier mal sécurisé, situation assez courante ici, ne voulait pas qu’on lui prenne son foi, son pancréas, ses reins, son cœur et ses poumons après sa chute d’un échafaudage bancal?

Le Conseil fédéral s’émeut-il vraiment de la mort de quelques individus? Fait-il preuve de respect envers les personnes endeuillées? Si oui, pour quelles raisons a-t-il répondu, fin 2021, à une motion parlementaire: non, un congé paternité ne doit pas être accordé aux pères dont l’enfant est né mort après une grossesse d’au moins 23 semaines? Le Conseil fédéral justifie sa position en expliquant que, comme il n’y a pas d’enfant dont il faut s’occuper, ces pères peuvent tout aussi bien retourner travailler. Circulez, il n’y a rien à voir.

Si ce n’est une médecine de pointe, valorisant nos industries hospitalières et pharmacologiques. Favoriser les dons d’organes, est-ce vraiment une histoire de sauver des vies, n’est-ce pas, tout en sauvant quelques vies à la suite de quelques morts, plutôt une histoire de prestige et de gros intérêts?

Muriel Bros,
Genève

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