S’affranchir des intuitions
Pour masquer son incurie dans la gestion de la crise sanitaire, le gouvernement français use de mesures coercitives et abuse d’arguments d’autorité, à défaut de convaincre. Résultat: les incohérences de la politique de santé publique ont engendré une profonde défiance populaire qui n’épargne plus les experts et les faiseurs de science.
Les temps de forte incertitude invitent plus que jamais à renoncer au sens commun, à choisir l’épreuve des faits, la vérification par l’observation, en délaissant tant de choses à la mode comme le «ressenti», l’«expérience personnelle». Née de la confrontation des hypothèses, la science permet de rompre avec l’opinion, les préjugés ou de s’affranchir des intuitions. Elle s’exprime à travers une démarche méthodique, la recherche de la preuve et le regard des pairs. Autant de rappels qui peuvent échapper aux commentateurs trop pressés.
Cette nouvelle livraison de Manière de voir1> «Vérités et mensonges au nom de la science», Manière de voir, n° 179, octobre-novembre 2021, bimestriel édité par Le Monde diplomatique, www.monde-diplomatique.fr propose tout d’abord une plongée dans les connaissances actuelles, du cosmos aux gènes, en passant par le cerveau ou le climat. Elle revisite les introspections de savants dont les travaux sur l’atome ont rendu possibles les armes nucléaires, ou celles sur la génétique qui pourraient conduire à un eugénisme édulcoré. Les découvertes deviennent lourdes de menaces pour l’humanité quand elles chavirent vers la technoscience et le diktat de l’innovation. Deux spécialistes interrogent ainsi les expériences menées dans le laboratoire chinois de Wuhan et ceux du même type dans le monde. D’où l’importance d’une recherche libérée des influences qui pèsent sur elle, en particulier dans la médecine ou en matière d’environnement. Car les moyens de l’industrie peuvent affaiblir bien des savoirs, en faisant diversion par la promotion d’études secondaires et la mise à l’écart de données essentielles. Prolifèrent aussi les pseudosciences, les parasciences, la confusion entre ce qui relève du bien-être et des thérapies. Autant de croyances qui polluent toute approche rationnelle des risques… voire les discussions entre amis ou collègues.
Plusieurs textes analysent l’invisibilisation des femmes dans la production des connaissances, le difficile rapport du politique et de la science – illustré par les négociations sur le dérèglement climatique – ou encore l’intérêt et les limites de la zététique, cette nouvelle approche sceptique. Cartes, chiffres-clés et éclairages plus courts permettent aussi de faire le point sur les priorités des grands pays, le crédit impôt recherche, le principe de précaution, la fabrication de l’ignorance, ainsi que sur les parcours hors normes de savants comme Albert Einstein, Robert Oppenheimer ou Andreï Sakharov.
Notes