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Face détestable de la conquête spatiale

Dominique Petite réagit à un article sur le développement prochain du tourisme dans l’espace.
Espace

L’interview d’un responsable de l’Agence spatiale européenne (ESA) à propos du tourisme dans l’espace orbitaire (cf. Le Courrier du 2 juillet) est contestable. Les questions sont si inoffensives que l’on peut comprendre une certaine complaisance à l’égard des propos rapportés. Encore une fois, il est question ici des mêmes agents qui promeuvent le tourisme spatial et l’installation de bases habitables sur la Lune et sur Mars. Ce tourisme est une des faces détestables de la conquête spatiale, quintessence d’un capitalisme sauvage: primauté de la logique marchande, maximisation des profits pour une infime minorité, idéologie de la croissance et du progrès illimités, mépris pour les méfaits environnementaux, privatisation de l’espace autour de la planète et accointance avec l’industrie de l’armement. 

En effet, durant l’année 2020, 1250 satellites civils et militaires ont été mis en orbite. Un ancien traité international, datant de 1967, établissait le principe de non-appropriation et de non-militarisation de l’espace autour de la Terre et des planètes proches. Les milliardaires et les grandes puissances étatiques s’en moquent et bataillent pour occuper ces espaces. Le ciel étoilé, un bien commun, devient le territoire des plus riches et des plus belliqueux. Les scientifiques collaborent nécessairement à ces folles entreprises et permettent de les justifier en invoquant d’illusoires retombées bénéfiques pour l’humanité entière.

Le cadre de l’ESA, interrogé dans l’article publié, nous leurre en affirmant que «le développement du tourisme spatial pourrait en revanche être un atout pour la recherche et la science». Notre pays participant aux programmes spatiaux de l’ESA, il est légitime que le citoyen puisse donner son avis sur ces initiatives aventureuses marquées par la démesure. La recherche scientifique doit se concentrer prioritairement sur la sauvegarde de notre habitat terrestre et négliger les projets liés à la conquête spatiale. Lors de l’envol de Richard Branson, de Jeff Bezos et de leurs comparses en juillet, les médias vanteront probablement ces prouesses technologiques, alors qu’elles sont moralement et politiquement inacceptables.

Dominique-Fr Petite,
Lully (GE)

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