Un combat à la mode
Je me joins aux lecteurs qui critiquent votre recours à l’écriture inclusive, Mesdames Fiastri et Dumont, et Monsieur De Poli. Leurs nombreux arguments, auxquels je n’avais pas toujours pensé, sont fort pertinents et je m’y rallie complètement.
Je suis féministe et je me sentais bien seule, il y a une quarantaine d’années lorsque je me battais pour ne pas être appelée «Mademoiselle», ce qui me discriminait par rapport à mes collègues masculins, célibataires comme moi. Heureusement ce temps est bien passé. Je suis toujours engagée pour l’égalité des droits entre hommes et femmes, mais je ne crois pas que cette égalité doit être poussée jusqu’à une altération de l’écriture qui nous pousse à voir dans chaque être humain un homme et une femme. C’est pesant, artificiel et nous sommes tous gênés par l’inconfort de cette écriture. Ce n’est pas possible à la longue, et pour simplifier je lis tout au masculin. La lecture du Courrier devient pénible et, comme Madame Fiastri, je vais me mettre à préférer les articles «non maison». Il me semble qu’on pourrait appliquer ici un principe d’économie qui existe en linguistique et qui cherche à éviter des informations superflues, alourdissant le discours. Le langage épicène, différent de l’écriture inclusive, peut parfois prêter à réflexions, entre autre dans la féminisation des noms de métiers pourquoi pas?
Par contre je suis très gênée par l’invasion de l’anglais dans toutes les langues européennes et au-delà. Et je me demande pourquoi vous êtes-vous senti obligé d’écrire, dans votre éditorial du 5 mars: «… tâches du care que fournissent majoritairement les femmes.» Vous rendez-vous compte que cette invasion est en train de niveler les langues de notre planète au profit d’une seule? N’est-ce pas une discrimination cela? Mais, comme l’écrit le professeur François Grin: «L’usage de l’anglais se répand sans qu’on y oppose une réflexion critique et, à force, on finit par croire que c’est peut-être dans l’ordre des choses. […] La diffusion de l’anglais serait naturelle, inévitable, normale; il n’y aurait pas d’alternative, circulez, il n’y a rien à voir, rien à redire.» (Introduction à «la Domination de l’Anglais» un défi pour l’Europe de Robert Philipson). Il y a des combats à la mode et d’autres non!
Nicole Margot,
Lausanne