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La gauche brahmane

Pierre Aguet revient sur le dernier ouvrage de Thomas Piketty, Capital et idéologie.
Politique

Thomas Piketty nous explique que les partis sociaux-démocrates, partis des travailleurs, attachés à une meilleure répartition des richesses, dès la fin du 20e siècle, sont devenus les partis des diplômés: la gauche brahmane. Pas la gauche caviar. Elle perd progressivement son électorat populaire. Plus les électeurs étaient diplômés, moins ils (elles) votaient à gauche. Depuis 1980, c’est le contraire.

En 2012, François Hollande doit sa victoire aux plus hauts diplômés. Il obtient 47% des suffrages des «sans diplôme», 50% des diplômés du secondaire et 58% des diplômés supérieurs. La personnalité des candidats n’y est pour rien. Les élections de 2002 à 2017 le confirment. Diplômés souvent grâce à la gauche qui s’est battue pour l’égalité des chances au niveau de la formation, s’ils sortent d’un milieu modeste, ils restent reconnaissants. L’ancien parti des travailleurs devient le parti des gagnants du système éducatif et progressivement se sépare des catégories populaires. En France, en 1956, 75% des électeurs n’ont qu’un diplôme primaire. En 2012, ils ne sont plus que 18%.

Dans tous les pays développés, le phénomène est le même. Il faut s’en réjouir. Une chance pour la gauche politique et syndicaliste suisse de pouvoir compter sur ces militants bien formés. Elle dispose d’élus et élues efficaces à tous les niveaux. Mais il faut être attentifs à deux choses: ces brillants militants (tes) doivent prendre le temps de fréquenter la base, de l’écouter, de lui laisser une certaine influence et revenir à cet objectif qu’ils négligent trop: se battre pour une meilleure répartition des revenus. Une des clés serait une imposition lourde des profiteurs du système capitaliste.

Pierre Aguet,Vevey

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