Chroniques

«Sans-abrisme»: pour une action commune des communes

L’IMPOLIGRAPHE

Au début de l’été, à Genève, des lieux ouverts aux sans-abri depuis plusieurs mois ont fermé. Il faisait beau, on se disait qu’on pouvait sans trop de mauvaise conscience, remettre les SDF à la rue. En se renvoyant au passage la balle de la responsabilité de les abriter, de les nourrir, et ensuite de leur trouver un logement. Et comme la Ville de Genève s’en charge depuis des lustres, même si les autres villes du canton s’y sont mises aussi, surtout quand elles sont gouvernées par des exécutifs à majorité de gauche, le canton peut les laisser faire sans trop se mouiller lui-même. Résultat? Trois mois plus tard, avec 120 places d’hébergement perdues à la caserne des Vernets, la Tribune (de samedi) peut titrer «Le flot des plus démunis grossit en ville» dans les derniers lieux d’accueil de jour maintenus ouverts – alors que la pluie d’automne s’abat sur les sans-abri. Ils sont un millier, et la situation est «catastrophique», résume le collectif d’associations prenant en charge l’urgence sociale, CausE, qui prévient: «Un drame humain sans précédent se prépare à Genève, les plus précaires sont en train de devenir, au sens propre, les sacrifiés de la crise sanitaire.» Catastrophique, la situation humanitaire, donc. Et la situation politique?

Une motion de gauche (PS-Parti du travail) pour la création d’un fonds intercommunal de soutien à l’action sociale a été déposée au Conseil municipal de la Ville de Genève, a été adoptée à l’unanimité en commission de la cohésion sociale et est à l’ordre du jour du Conseil municipal d’aujourd’hui et de demain. Et de son côté, ou sur son trône, le Conseil d’Etat a concocté un avant-projet de loi pour, selon lui, «clarifier les responsabilités» entre les communes et l’Etat. Mais en fait de clarification, on a surtout un conflit de plus entre un canton qui veut faire payer les communes, et des communes qui ne sont d’accord de payer qu’en échange de compétences réelles, dans un canton qui est celui, en Suisse, qui leur en accorde le moins. Les communes ne refusent pas de contribuer à l’action sociale, elles refusent qu’on leur transfère des charges sans les compétences qui correspondent à ces charges. «On ne peut pas tout régenter et se contenter de piocher l’argent manquant dans les poches des autres» (surtout quand le canton refuse d’augmenter un tout petit peu l’impôt cantonal), résume le conseiller administratif de la Ville Alfonso Gomez. Le président de l’Association des communes genevoises (ACG), Xavier Magnin, qui estime que le canton mène une politique de comptable plutôt que de projets, de préciser: «On ne nous demande même pas de payer une facture, mais tout simplement de subventionner l’Etat.» Et la conseillère administrative onésienne Carole-Anne Kast conclut: «Il faut que l’Etat cesse de nous considérer comme des fonctionnaires. Nous sommes des élus.»

Les associations assumant l’accueil d’urgence des sans-abri arrivent bien à travailler ensemble… il n’y aucune raison pour que les communes n’y arrivent pas, avec ou sans le canton. Elles y sont prêtes, assure leur instance commune, l’ACG. Elles y sont prêtes, pour autant bien entendu qu’on leur en laisse la capacité. C’est ce que notre motion au Conseil municipal propose. Est-ce trop demander, une action commune des communes?

Notre chroniqueur est conseiller municipal carrément socialiste en Ville de Genève.

Opinions Chroniques Pascal Holenweg

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lundi 8 janvier 2018

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