Édito

Qui sont les vrais privilégiés?

Qui sont les vrais privilégiés?
Les fonctionnaires seront à nouveau dans la rue le 29 octobre. KEYSTONE
Grève

La fonction publique genevoise s’est fortement mobilisée jeudi, à l’appel du Cartel intersyndical. Quelque 3500 personnes au départ du cortège à la place Neuve; près de 6000 manifestants à l’arrivée, selon les organisateurs et la police. Un test crucial pour les semaines qui s’annoncent. Ni le froid, ni le Covid, ni le chantage n’ont provoqué de démobilisation. Pourtant, la propagande de la droite politique et patronale s’est déployée à plein régime ces derniers jours, stigmatisant une «caste» de soi-disant privilégiés, qui pleurent la bouche pleine et qui feraient preuve d’indécence en défendant leurs droits. Un discours fidèlement relayé dans les médias adossés à ces milieux.

Ce chantage ne prend pas. Et c’est tant mieux. Il faut dire que la corde commence à être sérieusement usée. Depuis les années nonante, date des premières grandes grèves, à chaque mouvement social, il a été servi accompagné de tel ou tel assaisonnement pour faire diversion. Mais le fond de cette soupe bourgeoise reste toujours le même. Il cherche surtout à occulter que, depuis vingt ans, ces mêmes milieux pratiquent la politique des caisses vides. Les baisses d’impôts se sont succédé à un rythme effréné. Pour le plus grand bonheur des nantis. La dernière en date, RFFA, a permis aux entreprises d’économiser près de 900 millions de francs (compensés pour moitié par les rentrées nouvelles payées par les anciens bénéficiaires des statuts spéciaux). Mais à ces acteurs économiques, pas question de demander de faire preuve de solidarité.

Une nouvelle fois, c’est sur la fonction publique que l’on tape. Avec des pertes de revenus pour les travailleurs du secteur public évaluées entre 6% et 9%. Belle manière de reconnaître les efforts de celles et ceux qui étaient en première ligne ce printemps. Il est vrai que les applaudissements, c’est gratuit. Au-delà du cynisme froid affiché par le gouvernement, c’est aussi le rôle redistributeur de l’Etat qui se joue dans ces batailles. Celui des prestations délivrées à la population, indépendamment des revenus. Un revenu indirect qui bénéficie aux plus modestes.

C’est bien cette mission égalitaire qui est dans le collimateur. Non seulement, les prestations coûtent cher mais en plus il serait possible de les transformer en source de profit pour un capital qui peine à trouver des nouveaux marchés. La défense des acquis salariaux est légitime; mais de surcroît il convient encore et toujours de rappeler que c’est bien une certaine vision du rôle de l’Etat qui se joue et que cela concerne les 99% de la population.

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