Résistance aux centres de renvoi
Près d’un millier de personnes ont dénoncé samedi la construction d’un centre de renvoi qui doit voir le jour quasiment sur le tarmac de l’aéroport de Genève. Au Grand-Saconnex, là où aucune autre habitation n’est autorisée, le Conseil fédéral parquera dès 2022 des requérants d’asile que la Suisse ne veut pas accueillir… avant de les renvoyer au plus vite.
La méfiance envers le projet est grande. L’année dernière, le Grand Conseil demandait via une motion au gouvernement genevois d’y renoncer, les élus s’inquiétant de conditions de vie carcérales, y compris pour des familles, et de la proximité avec la piste de décollage de l’aéroport. L’exécutif y avait répondu frileusement, refusant de remettre en question le projet fédéral. Se montrant même rassurant sur la future prise en charge des requérants.
Les cas des autres centres fédéraux ont pourtant de quoi alarmer. Au centre de Chevrilles (FR), des requérants dénoncent ouvertement depuis cet été des actes de violence de la part des agents de sécurité. Des dérives ont été également signalées dans un centre de renvoi à Bâle. Le problème s’avère structurel, surgissant alors que la nouvelle procédure d’asile vise à réduire les coûts. Les centres de renvoi répondent à une logique d’économicité maximale, au détriment de l’humain. Les entreprises privées mandatées par la Confédération pour les gérer maximisent leurs profits. Des agents de sécurité y ont dénoncé des conditions de travail lamentables et un manque criant de formation face à une population souvent en détresse.
Résister contre un centre de renvoi, c’est résister contre la politique d’asile inhumaine de la Suisse, alors que la solidarité est plus que jamais nécessaire. Il n’est plus possible de rester complices des camps de la honte en Grèce et des naufrages en Méditerranée. En Italie, l’ancien ministre de l’Intérieur Matteo Salvini est jugé pour avoir empêché le débarquement de 116 réfugiés en 2019. Ces abandons de la part des gouvernements risquent toutefois de se répéter tant que le reste de l’Europe ne fait pas preuve de solidarité.
L’abolition du système Dublin, annoncée en septembre par la Commission européenne, mettra fin à une politique absurde et ouvre la voie à une hypothétique meilleure répartition des réfugiés. Alors que la Suisse renvoie massivement des requérants dans leur premier pays d’arrivée en Europe en vertu des accords Dublin, elle sera forcément amenée à repenser ses procédures d’asile et ses centres de renvoi.