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Le risque d’un embrasement

Le risque d’un embrasement
Missile lancé en direction de la région disputée du Nagorny Karabakh. Image publiée par le ministère de la Défense d’Azerbaïdjan le 27 septembre. KEYSTONE
Nagorny Karabakh

Les armes ne se taisent plus aux frontières de l’Europe et de l’Asie. Les braises syriennes et irakiennes encore chaudes, c’est le Caucase qui s’est enflammé dimanche dernier. Chaque camp accuse l’autre d’avoir rouvert les hostilités autour de l’enclave du Haut-Karabakh, sous souveraineté azerbaidjanaise, mais peuplée essentiellement d’Arméniens et contrôlée militairement par Erevan depuis trois décennies.

Dans les faits, il semble bien que l’offensive porte la marque de l’Azerbaïdjan, avec l’appui de ses alliés israéliens et turcs. Plusieurs témoignages font état d’ex-«rebelles» syriens recrutés par Ankara pour soutenir la reconquista de la région naguère attribuée par Staline à l’Azerbaïdjan. Le recrutement se serait toutefois avéré difficile, les islamistes sunnites se montrant rétifs à soutenir leurs «frères» chiites du Caucase… Rien n’est simple.

De ces pudeurs, Recep Tayyip Erdogan n’en a guère quand il s’agit d’enfoncer un coin dans le pré carré de ses voisins russes et iraniens. Le «sultan» sait en outre tout le bénéfice politique qu’il peut retirer en flattant la fibre anti-arménienne de ses concitoyens.

Reste que la responsabilité de ce conflit n’incombe pas, et de loin, aux seuls Turcs. Gavé de profits pétroliers, l’Azerbaïdjan de la dynastie des Aliyev ruminait sa revanche depuis le cessez-le-feu de 1994, qui avait entériné l’occupation arménienne du Haut-Karabakh. Avec ses pipelines vers l’Europe, précieuse alternative au gaz russe, sa proximité avec l’OTAN et une armée modernisée, le pays a aujourd’hui pleinement conscience de sa nouvelle puissance.

Quant aux Arméniens, forts de leur victoire militaire des années 1990 et d’un habile positionnement géopolitique – soutenus à la fois par la Russie, l’Iran et l’UE –, ils n’ont jamais montré un grand intérêt pour les négociations de paix menées sous l’égide de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE).

Satisfaites, elles aussi, du statu quo, les grandes puissances, qui alimentent chacun des belligérants en armes, n’ont rien entrepris de sérieux pour résoudre le conflit. Laissant la situation pourrir, au grand dam, en particulier, des habitants de la région contestée.

Après avoir freiné l’instauration d’une paix durable, l’imbroglio géostratégique pourrait maintenant, comme en Syrie, favoriser un embrasement du Caucase. Les appels internationaux à l’apaisement demeurent en tout cas bien timides à ce jour.

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