Une triste page de notre histoire
A un moment où est revisitée l’histoire de certains de nos «grands» hommes dont le maintien ou le déboulonnage des statues se pose…notamment avec celles de Agassiz et de David de Pury, je ne peux m’empêcher de me souvenir d’un livre qui m’avait profondément heurtée par sa violence à l’égard d’enfants et jeunes adolescents.
A l’Office de tourisme de Hyères, alors que nous allions faire une semaine de randonnée dans la région, je tombe sur un livre, dont le titre et le résumé succinct au dos suscite ma curiosité: Les Enfants de l’île du Levant (Ed. JC Lattès) par Claude Gritti qui décrit le bagne pour enfants, dans les années 1840, pensé en Suisse, par deux hommes dont le comte Henri de Pourtalès, issu d’une famille huguenote cévenole chassée vers la Suisse suite à l’Edit de Nantes; il est en charge du domaine familial dans le canton de Neuchâtel et est doté d’une fortune importante. L’autre, Louis Napoléon Bonaparte a grandi en Suisse, en Thurgovie, au château d’Arenenberg et sera élu ultérieurement président de la IIe république française.
Nantis d’un projet de redressement moral, ces deux hommes vont acheter en lingots d’or provenant de la Suisse ce bout de terre inculte qu’est l’île du Levant, au large de Hyères, et créer en fait un bagne pour mineurs appelé «colonie agricole pénitentiaire», en fait un bagne pour des enfants de tous âges, même 5-6 ans. Le gros du travail consiste en défrichement et mise en valeur de cette terre. Ce sont des «ex-grognards» de la Grande Armée qui en sont les garde-chiourmes, d’une main de fer.
Pour dire la dureté de cet enfermement, un jeune adolescent qui a réussi à s’échapper de cet enfer, en bateau à voile, mais sera arrêté à son arrivée à Toulon et mis en prison, écrira à ses anciens copains de bagne que la prison est un Eldorado à côté de ce qu’il a vécu sur l’île: nourriture quotidienne, eau, pas de gros travail de déboisement sous les coups, douche, salubrité, etc.
Si jamais, je vous invite à découvrir ce pan de notre histoire en cette période d’été et à pouvoir évoquer les pages sombres de notre histoire et de certains membres de ces dites «grandes familles» neuchâteloises et autres.
Marie-Pierre Maystre,
Genève