Semi-normalité
Assiste-t-on à un retour à la normalité, comme le laisse entendre le Parti libéral-radical qui plaide pour de plus importants assouplissements? Voire. D’un point de vue légal, le Conseil fédéral a effectivement décidé mercredi le passage d’une situation «extraordinaire», où de quasi pleins pouvoirs lui étaient octroyés, à une situation dite «particulière». Dont acte.
Toute une série de restrictions ont été significativement allégées ou le seront dans un futur proche. Des rassemblements de 30 personnes seront de nouveaux légaux, des manifestations comptant 300 activistes, également. Un semblant de convivialité sera de nouveau de mise dans les restaurants. Tant mieux, même si ce n’est pas encore open bar.
Mais on est loin d’un retour au statu quo ante. La culture restera sérieusement corsetée. Les rassemblements de plus de 1000 personnes restent interdits jusqu’à fin août. La fête nationale sera un peu tristounette cette année.
Surtout, on relèvera que les signaux les plus importants ont été envoyés en direction de l’économie. La libre circulation des travailleurs sera à nouveau autorisée dès le 8 juin et celle des personnes à l’intérieur de l’espace Schengen dès le 6 juillet.
Le Conseil fédéral n’a pas oublié que l’on vote sur l’initiative de résiliation des accords bilatéraux à la rentrée: il ouvre à la fois les vannes du marché du travail, tout en promettant des mesures destinées à favoriser la main-d’œuvre présente en Suisse. Le fameux consensus mou, cher à la Suisse. Dans ce domaine, le retour à la normalité est effectivement perceptible.
Les semaines qui suivront s’avéreront cruciales en termes de libertés publiques et de droits démocratiques. Si certains de ces derniers sont rétablis – la récolte de signatures dans le cadre de campagnes référendaires ou d’initiatives est à nouveau possible –, on se rend bien compte que ce droit reste sous contrainte et que le climat politique ne sera guère favorable à l’exercice de la démocratie semi-directe.
Pour l’heure, l’exécutif fédéral garde la main. Sur les cantons – la subsidiarité reste un concept un peu creux pour l’heure – et, en partie, sur le parlement. Pour l’heure, le législatif n’est pas parvenu à jouer son rôle de premier pouvoir. Il s’est surtout borné à quittancer des décisions du gouvernement. La politique devra reprendre ses droits. Il sera important d’y veiller, y compris dans la rue, en revendiquant pleinement l’application de ces libertés fondamentales.