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Tout devient permis

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Une majorité de sénateurs ne voit aucun obstacle à ce qu’une entreprise recoure à de l’argent public pour récompenser les porteurs de parts. KEYSTONE/PHOTO PRETEXTE
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«Open bar», ou presque. Le Conseil des Etats a défait mercredi ce qui était passé à une courte majorité au National: les sociétés qui ont recouru au chômage partiel pourront donc verser des dividendes à leurs actionnaires. Un vote très net, à 31 voix contre 10.

Une majorité de sénateurs ne voit aucun obstacle à ce qu’une entreprise recoure à de l’argent public pour récompenser les porteurs de parts, quand bien même la Confédération a injecté quelque 6 milliards de francs dans l’assurance-chômage pour couvrir le recours massif au chômage partiel dans le cadre de la crise du covid-19. Le contribuable était en droit d’attendre un peu de retenue de la part du lobby patronal, mais les vieux réflexes ont la vie dure.

Seul argument valable: le mécanisme avait un effet rétroactif pour certaines entreprises qui ont déjà versé leur écot. On rétorquera que ces sociétés ne sont certainement pas tombées de la dernière pluie. Elles étaient pleinement conscientes de l’indécence qu’il y avait à rémunérer des actionnaires tout en mettant son personnel au chômage technique.

Les autres arguments pour permettre aux grosses entreprises – les petites n’étant pas concernées par la proposition – de faire coup double valent leur pesant d’or. On a pu entendre tour à tour des conseillers aux Etats relever que le chômage partiel était versé aux employés et qu’il ne représente pas une subvention. Ou encore que certaines entreprises pourraient préférer licencier leurs employés plutôt que de réduire le loyer versé aux actionnaires, si l’on en croit les saillies d’un Guy Parmelin en train de dorloter son oreiller de paresse intellectuelle. Quelques larmes de crocodiles ont même été versées sur ces collectivités publiques, actionnaires de certains groupes, qui pourraient se retrouver spoliées de revenus.

Au-delà de l’arrogance de la Chambre haute, la question demeure ouverte: ce hold-up sera-t-il suivi par d’autres? Ainsi, le chômage partiel ne doit pas être suivi de licenciements, puisqu’il est censé, précisément, éviter la destruction des emplois. Or certains groupes ont d’ores et déjà annoncé des coupes claires à l’interne. Attendront-ils les délais légaux pour ménager la façade ou se permettront-ils de s’asseoir sur la loi puisque, désormais, tout semble possible?

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