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Pompeo annule le droit international, Netanyahou applaudit

AU PIED DU MUR

Le secrétaire d’Etat américain, Mike Pompeo, vient de déclarer que les colonies israéliennes en Cisjordanie sont légales. Mon grand père aurait répondu en yiddish: «hot er gesogt», ce qui peut être traduit par «il a dit, et alors?»

Le droit international – la quatrième Convention de Genève en particulier – est sans ambiguïté sur la question: tout transfert de population d’un pays occupant dans les territoires qu’il occupe est illégal et considéré comme un crime de guerre. Les colons et ceux qui les envoient, les soutiennent ou les tolèrent sont des criminels de guerre, et doivent ou devront être traités en tant que tels, tôt ou tard.

Depuis 1968, la position de l’ensemble de la communauté internationale – y compris les Etats-Unis – est cohérente avec cette position de principe, et même si elle s’est gardée de prendre des mesures concrètes contre cette grave violation du droit international, elle a régulièrement dénoncé la colonisation israélienne dans les territoires palestiniens (et syrien) occupés. Comme dans beaucoup d’autres domaines.

Avec Trump, tout a changé, et pas seulement l’orientation politique de la Maison-Blanche: la réalité-selon-Trump vient remplacer le monde réellement existant. De même qu’il n’y a pas de réchauffement climatique, ou encore que le Groenland ne fait pas partie du Danemark, de même n’y a-t-il pas de droit international. Il s’agit là d’une dérégulation d’ordre planétaire. En dépit du consensus international (à part la Micronésie et les Iles Marshall!), Trump déclare que Jérusalem est la capitale d’Israël, et y transfère son ambassade; quant aux territoires occupés, cela n’existe pas, tout au plus des territoires dont le statut doit être, un jour, négocié.

Netanyahou et les Evangelistes applaudissent des deux mains. Ce faisant, le premier ministre israélien confirme une fois de plus qu’il a oublié ce que c’est qu’être juif. La régulation des relations internationales, la Déclaration universelle des droits de l’Homme, les Conventions de Genève ont été la réponse de la communauté internationale à la barbarie nazie, au judéocide en particulier: «plus jamais ça», ont dit les nations, pour une fois unies, le monde ne peut ni ne doit être une jungle où règne la loi du plus fort.

C’est précisément avec cette approche que Donald Trump a décidé de rompre, avec l’élégance qu’on lui connaît. En saluant la déclaration du secrétaire d’Etat étasunien, le gouvernement néoconservateur israélien tourne ostensiblement le dos à l’histoire de notre peuple, victime millénaire de la loi du plus fort. Est-ce un hasard si ce sont deux grands juifs, René Cassin et Stéphane Hessel qui, avec Eleanor Roosevelt, ont été les rédacteurs de cette Déclaration universelle qui se voulait la feuille de route de la civilisation post-nazie?

La dérégulation du droit international est une menace pour toutes les minorités de la planète. Si la colonisation n’est plus illégale, qui nous garantit que demain, le racisme, voire les génocides, ne seront pas légitimes? Les juifs en seront parmi les premières victimes. A force de s’acoquiner avec des Bolsonaro et autres Orban, Netanyahou a depuis longtemps oublié ce que c’est qu’être juif.

Notre chroniqueur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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lundi 8 janvier 2018

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