Aux côtés des enfants de Palestine
Alors que les nations réduisent la voilure de l’UNRWA [Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés palestiniens], nous sommes plus déterminés que jamais à maintenir nos activités en Palestine1>Contrairement à ce qui a pu être avancé; cf. l’agora «Un coup de plus porté au peuple palestinien» de Bernard Borel, Le Courrier du 3 septembre.. En 1973, nous y avons monté nos premières opérations pour lutter contre la malnutrition. Quarante-six ans plus tard, le problème persiste dans 60% des foyers! Les conséquences du blocus sont lourdes et les populations n’ont jamais eu autant besoin d’aide. Plus de la moitié des habitants de la bande de Gaza vit en dessous du seuil de pauvreté. Le taux de chômage des jeunes adultes y dépasse les 70%. L’isolement économique a conduit les familles à recourir à des mécanismes d’adaptation négatifs comme la banalisation du travail des enfants. Le mariage précoce et l’abandon scolaire sont des pratiques de plus en plus courantes. Dans un climat de stress et de tension familiale, la violence domestique touche les enfants de plein fouet. La situation dans son ensemble a des conséquences lourdes sur le respect des droits de l’enfant. Leur accès à l’éducation, à la santé, aux services de protection, à la nourriture est menacé chaque jour.
Fortement implantés dans la région, reconnus pour notre expertise dans le domaine de la protection de l’enfance, nous travaillons étroitement depuis trois ans avec les ministères de la Justice et des Affaires sociales sur la réintégration des jeunes en contact avec la loi, dont les droits ne sont pas toujours respectés. A l’instar de nombreux pays au Moyen-Orient, la Palestine connaît différents systèmes de justice. La loi n’est pas systématiquement appliquée de la même manière pour les enfants de Gaza ou de Cisjordanie, selon le type de justice traditionnelle qui s’impose. Il s’agit pour nous d’instaurer un dialogue constructif entre la justice formelle et informelle dans l’intérêt de l’enfant. Dans un but d’équité, nous encourageons les autorités à mettre en place des alternatives à la détention, moins coûteuses et moins traumatisantes pour les enfants, et à privilégier une approche différenciée entre filles et garçons. Pour les jeunes auteurs de délits, l’approche restaurative à laquelle nous avons convaincu les autorités d’adhérer prend tout son sens. Elle facilite une réintégration dans la communauté et offre des perspectives d’apprentissage à ces jeunes en mal d’avenir. Considération de la justice traditionnelle, mise en place d’alternatives à la détention, considération de l’intérêt supérieur de l’enfant: nous travaillons sur tous ces axes en bonne intelligence avec les autorités, la police, les enseignants, les parents et la communauté de l’enfant. Avec succès.
Cette approche inclusive, qui vise à changer les systèmes en place et à améliorer durablement les pratiques sanitaires, comme la généralisation du lavage des mains dans les écoles de Gaza, caractérise notre travail en Palestine, mais aussi dans tous les pays de la zone où nous intervenons dont l’Irak, l’Egypte, le Liban, la Jordanie ou l’Afghanistan.
En Palestine, les enfants paient le prix fort. Grâce à des bailleurs fidèles, comme la Chaîne du Bonheur et l’Unicef, nous avons pu soutenir 30 000 bénéficiaires l’année dernière. Ce chiffre peut sembler important. Il représente pourtant une contribution relative au regard de l’ampleur des besoins que nous constatons chaque jour sur le terrain. Tant que les financements le permettront, nous poursuivrons nos activités, grâce à nos partenaires en Cisjordanie et à nos propres équipes dans la bande de Gaza.
Notes
L’auteure est cheffe de zone Moyen-Orient, Afrique du Nord, Terre des hommes – aide à l’enfance.