Édito

Greta et le CETA

Greta et le CETA
KEYSTONE
Climat

Une jeune femme de 16 ans qui suscite autant de sarcasmes et de réactions violentes… Greta Thunberg n’est pas le thermomètre du seul réchauffement climatique, elle met également en lumière le désappointement d’un monde qui, quoi qu’il en dise, se sait en sursis. Alors certes, la prestation de la Suédoise, mardi devant l’Assemblée nationale française, n’a pas empêché les députés de ratifier dans la foulée un énième traité de commerce climaticide. Mais le seul fait qu’à travers le CETA le libre-échangisme soit – enfin – débattu dans sa dimension écologique prouve que les lignes bougent sérieusement.

Après des années de fuite en avant au nom de la sainte croissance du commerce mondialisé, la remise en question du Traité de libre commerce entre l’UE et le Canada (CETA) touche les fondamentaux du capitalisme. Les limites du développement expansif sont atteintes, chercher la croissance dans l’extraction de nouvelles ressources ou la globalisation du marché conduisent au même épuisement de la planète. Les signes de la crise se multiplient, et les seules réponses crédibles avancées jusqu’à présent impliquent la régulation politique et la relocalisation.

En donnant encore plus de pouvoir aux multinationales, le CETA apparaît comme le symbole d’un modèle condamné. Un occident qui a les cleantech plein la bouche, mais transfère massivement, de traités en traités, la production industrielle vers des pays sans législations environnementales, dopant au passage le très polluant transport maritime. Une Europe qui se rassure avec son mantra de «transition énergétique» mais ouvre une voie royale au pétrole des sables bitumineux de l’Alberta, de loin le pire des ors noirs. Greta Thunberg n’a pas eu besoin de signifier explicitement tout cela à la tribune pour que l’insupportable auto-aveuglement des élus n’apparaisse au grand jour.

Dans ce contexte, la violence des attaques venues des représentants de la droite est bien compréhensible. Rattrapés par la marche du monde, ils savent que la première extinction concernera leurs certitudes et les politiques qu’ils imposent au monde depuis trop longtemps.

Il est beaucoup plus gênant de voir une certaine gauche rejoindre le chœur anti-Greta, entre théories du complot quant à l’entourage de l’adolescente et (m)paternalisme à peine voilé. Point besoin de sauveuse suprême parfaite, juste d’un peu de respect envers une adolescente qui a mis des millions de jeunes en mouvement. Et de ne pas se tromper d’ennemi.

Opinions Édito Benito Perez Climat

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