La droite municipale a-t-elle perdu la raison?
On peut s’inquiéter de l’état de certain-e-s élu-e-s de la droite municipale en Ville de Genève. Dans Le Matin dimanche du 30 juin, Simon Brandt (conseiller municipal PLR) clame le plus sérieusement du monde que l’exécutif de la Ville de Genève d’aujourd’hui c’est «la chute de l’Empire romain». L’élu PDC Alain de Kalbermatten lui emboîte le pas. A les lire, la Ville de Genève est devenue comme une municipalité ayant touché le fond, la honte de la Confédération. En somme, un hommage funèbre à une gauche municipale moribonde… C’est le moment de corriger ce torrent de fake news.
Il faut regarder la réalité en face. Six référendums perdus, douze décisions municipales annulées par le Conseil d’Etat, une collectivité de 200 000 habitant-e-s sans budget, des comptes refusés pour des motifs puérils (finalement validés par le Canton)… le bilan de la droite est affligeant. Depuis 2015, ses coupes aveugles dans les budgets ont été refusées à six reprises par la population. Depuis 2015, elle a joué les mauvaises perdantes en rejetant des budgets et comptes pourtant bénéficiaires. Depuis 2015, elle a gaspillé l’argent et le temps du contribuable en débattant plusieurs heures pour rebaptiser la Fête des écoles en Promotions, une décision cassée par le Conseil d’Etat. Début juillet, ses porte-voix annonçaient dans le GHI une pétition demandant… le retour des Promotions! En quatre ans, elle a élu quatre présidents masculins de droite, au mépris de l’alternance institutionnelle et de la diversité. Elle a voulu punir l’Usine avant de se faire désavouer par le Canton. Encore un dernier? Fin juin, la droite a refusé les comptes 2018 malgré un boni de… 90 millions.
Au lieu de prendre leurs responsabilités et de travailler sérieusement, beaucoup d’élu-e-s PDC, PLR, UDC et MCG ont choisi l’hystérie politique et l’agitation médiatique. Après cinq ans, le bilan n’est pas brillant. A les entendre proclamer à longueur de temps que «la Ville est mal gérée», «les finances municipales sont un cloaque», «les services publics sont boursouflés» et que «les impôts tuent l’économie», on se dit qu’ils sont bien éloignés des réalités. «Calomniez, calomniez, il en restera toujours quelque chose» dit-on en évoquant le triste Bazile du Barbier de Séville.
Bien entendu, il y a de réels problèmes, l’affaire des notes de frais a marqué les esprits et les anciennes pratiques du plusieurs membres du Conseil administratif et de hauts fonctionnaires ont choqué, et pour longtemps. Changer le système reste d’actualité. S’y engager est un devoir.
Mais on attend autre chose des élu-e-s que des calculs d’épicier. Il s’agit de porter un vrai projet politique. Et en Ville, la gauche connaît plusieurs succès: une action forte contre les discriminations de genre et d’orientation sexuelle, une politique culturelle d’ouverture via la Nuit des musées ou les Journées des métiers d’art, des prestations de qualité avec des finances saines, de nouveaux logements créés, etc. Le bilan est là, les projets aussi: une Ville ouverte, qui accueille des habitant-e-s, tout en assurant la qualité de vie, la cohésion sociale, l’existence dans la dignité et l’accomplissement de chacun-e, une protection de l’environnement au service des habitant-e-s. Ces problèmes bien réels sont plus lourds et graves que ceux vécus montés en épingle par une droite devenue hystérique. Alors au lieu de refuser la réalité et d’en faire des tonnes – la méthode Trump en somme – la majorité législative ferait bien de retourner bosser. Rendez-vous au printemps 2020.
Olivier Gurtner est vice-président du Parti socialiste Ville de Genève, conseiller municipal.