Édito

Qu’a-t-il donc compris?

Appel à suspendre l'usage du LBD
KEYSTONE
Gilets jaunes

«Je crois que j’ai compris beaucoup de choses», a déclaré Emmanuel Macron jeudi au cours de sa conférence de presse. Il s’agissait du point d’orgue du «grand débat» entamé fin janvier pour tenter d’étouffer les revendications sociales des «gilets jaunes». Inlassablement, chaque samedi depuis novembre, ces derniers appellent à la justice fiscale, à des salaires dignes et à l’instauration d’un référendum d’initiative citoyenne (RIC). Le président a-t-il réellement compris ces demandes et les inégalités profondes qui les motivent? En ce cas, ses réponses au défi social qui grandit chaque semaine en France sont d’autant plus décevantes.

Annonce d’une baisse de l’impôt sur le revenu – mais pas le retour de l’impôt sur la fortune (ISF) – tout en promettant de renforcer les services publics, ce qui nécessitera une réduction de la dépense publique… Vous avez dit antinomique? Aux Français qui souffrent des emplois précaires aboutissant à de maigres retraites, il répond allongement du travail. Emmanuel Macron a eu beau marteler qu’il fallait «réhumaniser [son] projet de transformation de la société», l’intention est de poursuivre au pas de charge des réformes ultralibérales qui ont mis le pays à feu et à sang.

Littéralement. Car sa méthode pour calmer les foules réside dans la répression par les forces de l’ordre. Gardes à vue à la pelle, fichage des manifestants depuis les hôpitaux de Paris, violences policières y compris envers des personnes pacifiques. On répondra qu’il y avait des casseurs, des insultes racistes et antisémites dans les cortèges… La France en est arrivée à l’arbitraire, la punition collective, sans droit à un jugement équitable.

Et aux traumatismes crâniens, aux gueules cassées et yeux crevés par des tirs de lanceurs de balles (LBD), aux mains arrachées par des grenades de désencerclement et autres blessures graves, s’ajoute le musellement de la presse. Reporters sans frontières a dénombré 62 reporters victimes de la police, dont Gaspard Glanz, journaliste indépendant qui suit les mouvements sociaux et est traité en ennemi public.

Les Nations Unies ont demandé une enquête. Et les autorités françaises ont justifié sans rougir l’usage d’armes de guerre que sont les LBD à l’encontre de sa population. Osant même le mensonge, affirmant que les LBD n’ont jamais été utilisés à mauvais escient, alors que nombre de vidéos accablent la police, qui tient les têtes en ligne de mire. «Je crois aux symboles et à l’esprit du temps», a affirmé Emmanuel Macron. Il aurait été encourageant qu’il observe le symbole approchant du 1er Mai. Malheureusement, son gouvernement semble être devenu accro aux fumées lacrymogènes.

Opinions Édito Laura Drompt Gilets jaunes France

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