Édito

Armes à terre

Armes à terre
Le 19 mai, les Suisses voteront sur une modification de la loi fédérale sur les armes rendue nécessaire par une évolution du droit communautaire et qui concerne la Suisse, membre de l’espace Schengen. KEYSTONE
Armes à feu

Un référendum qui défie l’entendement. Le 19 mai, les Suisses voteront sur une modification de la loi fédérale sur les armes rendue nécessaire par une évolution du droit communautaire et qui concerne la Suisse, membre de l’espace Schengen.

Le recours aux urnes a été lancé par les milieux du tir sportif et le lobby des armes, avec l’UDC en embuscade. Le parti populiste pense qu’il y a une carte à jouer en attisant le sentiment antieuropéen, grigri toujours utile à quelques encablures des élections fédérales. C’est bien un vote contre le bailli de Bruxelles – plutôt que la défense du droit inaliénable des Helvètes à sortir leur carabine le week-end – qui motive le parti populiste et ses affidés.

Cette position frise l’abus: la Suisse a pu faire entendre sa voix lors de l’élaboration de cette directive. Les tireurs sportifs ont été dûment protégés et pourront continuer à dégommer des cibles; les discutables traditions comme le Knabenschiessen zurichois ont, elles aussi, eu droit à leur niche dérogatoire.

Pas de quoi brandir le deuxième amendement étasunien et revendiquer le droit de se balader enfouraillé tel un Schwarzenegger du dimanche. Ce texte est minimaliste. Il demande que la possession des armes semi-automatiques, celles qui ont fait tant de dégâts lors des derniers attentats comme à Christchurch, soit soumise à contrôle. Pour posséder un tel engin, il faudra justifier d’un usage régulier dans une activité de tir et accepter d’être inscrit dans un registre. Du simple bon sens. Un registre plus étendu aurait même été souhaitable. Il est tout de même étonnant, dans un pays qui comptabilise chaque pommier, on ne soit pas en mesure de localiser plus de 700 000 armes en circulation. La baisse globale de la violence passe aussi par ce genre de mesures.

Les obsessions antieuropéennes du bloc populiste sont d’autant plus étonnantes qu’un non menace les accords Schengen-Dublin. La Suisse deviendrait un Eldorado pour le trafic d’armes. Et le renvoi de requérants d’asile vers le pays de premier accueil s’en trouverait compromis. On pourrait s’en réjouir. Mais vu la mentalité de l’UDC, on imagine que ces milieux se voient déjà en train de se mobiliser aux frontières avec des fusils mitrailleurs ainsi sauvés pour bouter l’infidèle hors de nos frontières.

Opinions Édito Philippe Bach Armes à feu

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