Il faut redonner de l’espoir
L’Union suisse des paysans (USP) fait de la lutte contre les initiatives populaires «Pour une eau propre et une alimentation saine» et «Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse» un combat prioritaire. Elle se met en posture de déni, déni des pollutions avérées de l’eau et des sols, de l’extinction foudroyante de la biodiversité, de l’altération des fourrages et des aliments destinés aux humains, de l’impact sur le climat. Elle fait abstraction de l’état de fertilité de nos sols, ignore le legs que nous faisons aux générations futures. Elle se place dans le camp de l’agrochimie en tournant le dos à la société et à ses attentes.
En prétendant qu’on ne peut pas produire sans phytosanitaire de synthèse, l’USP réécrit l’histoire de l’agriculture et méprise tous ceux et celles qui pratiquent sans ces poisons, notamment les producteurs bio. Après nous et nos phytos, le déluge!
Cette position vient aussi remettre en cause des atouts d’importances: la confiance entre producteurs et consommateurs. Elle porte préjudice à l’empathie de la société qui s’est manifestée ces dernières années à la suite des luttes paysannes et face à l’acharnement de la politique néolibérale de l’Etat. Par sa vision entrepreneuriale de l’agriculture, à l’insu du paysannat, l’USP fait fi du lien intrinsèque de l’agriculture à la société avec qui elle vit et partage un territoire. L’eau, l’air, la biodiversité, les paysages, la fertilité des sols, etc. sont des biens communs inappropriables.
Le moment n’est-il pas venu de cesser de faire des combats d’arrière-garde. De prendre en charge la défense professionnelle au-delà du corporatisme. D’organiser un combat de fond afin que les producteurs reprennent le contrôle sur leurs productions en exigeant de mettre fin aux surproductions laitière, de porcs, de céréales, etc., qui sont source de gaspillage, de pression sur la nature, et d’étranglement des producteurs. Il est temps de projeter une agriculture de transition en adéquation avec l’environnement, la santé publique, l’équité locale et globale. Les 7 à 8 milliards de francs annuels de la Confédération pourraient servir à redynamiser l’agriculture plutôt que de laisser ce financement dans les mains de l’agro-industrie via les exploitations. Il faut redonner de l’envie et de l’espoir aux nouvelles générations paysannes. Il n’y a rien à attendre de la logique de la productivité à perpète par la concurrence mondialisée, sinon un désastre social et environnemental. Le monde agricole représente une force qu’on écoute, n’abusons pas et créons des alliances pour reprendre le sillon.
Osons un retour en avant!
Paul Sautebin,
La Ferrière (BE)