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Public ou privé?

Pierre Aguet rappelle que les entreprises privées ont comme but principal de faire du bénéfice.
Assurances

Jacques Dubochet, notre prix Nobel de Morges, affirme souvent qu’il faut comprendre la vie comme une éternelle tension entre le moi et le nous, entre l’égoïsme et l’altruisme. S’il a choisi son camp politique du côté de la gauche, c’est précisément parce que cette dernière fait plus facilement confiance à l’altruisme, à des solutions solidaires, seules capables de nous sortir de la plupart de nos difficultés. Le nous, l’altruisme, c’est l’avenir.

Il y a cinquante ans, lorsque j’exerçais la responsabilité de fourrier dans une compagnie de fusiliers de montagne, j’aimais bien expliquer qu’avec 1,70 franc par homme et par jour, mais avec une cuisine commune, j’arrivais à nourrir très correctement les 170 hommes de ma compagnie. Le pain, le fromage et le beurre étaient fournis à part, en dehors de ce franc septante. Nous arrivions avec mes excellents sergents de cuisine à nourrir des hommes qui salivaient en lisant les menus affichés à la cantine. S’ils avaient tous dû se débrouiller avec ce franc septante, ils n’auraient pas même pu se payer le petit déjeuner. La solution solidaire, imposée, nous permettait de faire des miracles.

Le débat a pris beaucoup d’ampleur dans les années 1980. La droite veut privatiser tous les services publics. Elle est loin d’y avoir renoncé. Ses arguments: moins cher, plus efficace. Comme elle y a souvent réussi, le peuple ne se laisse plus aussi facilement «enfumer» et peut comparer: la poste, les assurances maladie, etc. En France, la distribution d’eau. En Angleterre, les trains et le gaz.

Un secteur éclaire ce sujet de façon particulièrement significative. Parce que la comparaison a été faite dans le journal Bon à Savoir de décembre 2018, je me permets d’y revenir. Il s’agit de l’assurance incendie et autres dommages, obligatoire dans tous les cantons. Laissée à des acteurs privés la plupart du temps, mais à des institutions de droit public à Berne, Fribourg Jura, Neuchâtel et Vaud.

Les institutions privées encaissent, pour des prestations comparables, entre 434,85 et 571,55 francs. Les institutions de droit public entre 238 et 412,30 francs. La moyenne des privés est de 510 francs et du public de 360 francs (dans les exemples cantonaux mentionnés par le magazine) avec un soutien financier aux équipements des corps de sapeurs-pompiers ce qui soulage financièrement les communes.

Dans le débat sur l’assurance maladie, il serait judicieux de se souvenir de cette réalité économique, d’oublier les arguments idéologiques qui cachent des intérêts privés et se rappeler que toutes les entreprises privées existent essentiellement pour enrichir leurs propriétaires et pas leurs clients captifs ou pas.

Pierre Aguet, Vevey

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