Édito

Au-delà des maçons

Au-delà des maçons
Près de 1800 maçons ont défilé dans les rues de Genève lundi et mardi derniers. JPDS
Construction

La grève des maçons a bloqué deux jours durant les rues de Genève. Et novembre risque bien d’être à nouveau chaud. On se rend bien compte que cette affaire dépasse la stricte convention nationale régissant le gros œuvre. De quoi le conflit des maçons est-il le nom?

Les attaques contre les salariés frappent tous les corps de métiers. Et le dumping salarial n’est pas réservé aux métiers manuels. C’est à une lente érosion du consensus social – la sacro-sainte paix du travail – que l’on assiste.

Un paradoxe. Ou une hypocrisie. On entend les mêmes patrons se lamenter de la concurrence étrangère. Voire soutenir les actions entreprises par les syndicats pour lutter contre cette sous-enchère illégale mais que l’Etat met peu de zèle à poursuivre. A Genève, il a fallu une initiative populaire pour qu’une inspection des chantiers un tant soit peu offensive se développe.

Mais on ne peut pas à la fois prôner la liberté du renard dans le poulailler au niveau national et vouloir bloquer l’arrivée d’entreprises étrangères qui ont flairé l’aubaine. La seule arme contre ce type de dérégulation est de prévoir des garanties à l’emploi, de donner des droits aux travailleurs. De les protéger contre les licenciements par des patrons grippe-sou une fois qu’ils coûtent plus cher.

Jusqu’à présent, en Suisse romande, plus exposée à ce type de dumping salarial, cela était relativement bien compris. Visiblement, le vent est en train de tourner: l’hégémonie udéciste qui a vu les faîtières patronales alémaniques basculer dans le camps du parti blochérien est en train de gagner du terrain sur les bords du Léman.

C’est plus qu’inquiétant, et laisse augurer d’un durcissement du mouvement. Les mêmes milieux de droite qui s’inquiètent de l’initiative sur les juges étrangers ne semblent rien avoir appris de l’acceptation de l’initiative d’extrême droite sur l’immigration de masse, qui place la Suisse en porte-à-faux avec l’Union européenne. Ce type d’attitude antisociale alimente les peurs, est le terreau des populismes dont émergent les Brexit et autres Donald Trump. Il ne faudra pas venir pleurnicher par la suite, une fois qu’il sera trop tard. Le pire étant que ce ne sont même pas ces milieux qui paieront la facture finale.

Opinions Édito Philippe Bach Construction

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