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Une affaire si catholique

Une affaire si catholique
Le pape François a précisé sa pensée sur l'avortement mercredi devant 25'000 fidèles. KEYSTONE
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Le pape François avait déjà qualifié l’avortement de «crime». Mercredi, il a précisé sa pensée au cours d’une homélie sur la thématique du commandement «tu ne tueras point» devant 25 000 fidèles. Levant les yeux de ses feuilles, il s’est exclamé: «Vous trouvez cela juste? (…) On n’a pas le droit de se débarrasser d’un être humain, même s’il est tout petit. C’est comme engager un tueur à gages (un sicario) pour résoudre un problème.» Le parterre d’ouailles approuvant ­bruyamment.

Des propos qui nient le droit des femmes à disposer de leur corps. Qui visent à garder la main sur les ventres de la moitié de la population. Oui, une grossesse est une affaire sérieuse et un embryon a droit à un statut particulier. Mais un embryon (au premier stade de la vie intra-utérine) n’est pas un être humain; par définition, il n’est pas né. Un embryon est totalement dépendant des aléas de la nature (15% des grossesses s’arrêtent spontanément dans ces premiers mois). Certaines mères ou couples y projettent très tôt une existence, un être en devenir. D’autres y perçoivent un simple amas de cellules en développement. Aucun chronomètre ne décide à partir de quelle minute, jour ou semaine les cellules en question deviennent «quelqu’un»; cette équation est propre à chaque parcours de vie.

Le pape François a démontré que l’Eglise excelle toujours à mettre la pression sur les femmes en les culpabilisant, de même que le corps médical. L’histoire est vieille comme Eve et le péché originel. Fait dramatique: ses propos touchent au-delà du cercle des catholiques. Ils influencent des décideurs politiques et des votants. Et cela fonctionne: en Italie, 70% des médecins refusent de pratiquer les interruptions de grossesse en faisant jouer leur clause de conscience. En France, ils sont également nombreux (dont le président du syndicat des gynécologues), et certains hôpitaux publics ne permettent plus aux femmes d’accéder à ce droit. En Suisse, les patientes témoignent régulièrement de remarques blessantes, de médecins qui les obligent à regarder une échographie avant de procéder à l’interruption de grossesse, de tentatives de découragement.

Or il n’appartient pas (plus) à l’Eglise et au corps médical de décider en lieu et place des principales concernées. Il leur appartient d’œuvrer à une société prête à accueillir des enfants dans les meilleures conditions possibles. Des enfants désirés.

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